La culture des individus, dissonances culturelles et distinction de soi

 

Bernard Lahire

 

Par Marine L

 

 

 

Introduction

 

Bernard Lahire est professeur de sociologie à l’Ecole normale supérieure de Lyon et a publié une vingtaine d’ouvrages jusqu’à ce jour. Dans La culture des individus, il s’interroge sur les pratiques culturelles des Français, comment se forment leurs profils, et comment la perception de la culture se modifie.

 

I-              Légitimité, domination et croyance

 

Légitimité culturelle : quand un individu, un groupe ou une communauté croit en la supériorité de certaines activités et biens culturels par rapport à d’autre.

 

La théorie de la légitimité culturelle étudie les distances et les rapports à la culture, ses fonctions sociales et les effets sociaux de sa domination sur les groupes les plus démunis culturellement. Elle montre qu’il existe une correspondance statistique entre la hiérarchie des arts (ou des genres) et celle sociale/scolaire des consommateurs.

 

Lors d’une enquête, les enquêtés et les éléments composants la culture sont classés en catégories, ce qui contribue à stéréotyper les cultures au niveau du groupe. Mais dès lors qu’on entre dans le détail des pratiques individuelles et de leur contexte, leur diversité apparaît :

 

_ Il est dit que la culture illégitime (les émissions de téléréalité, les magazines people, les romans sentimentaux, le cinéma divertissant) correspond à un temps, à un cadre délimité, et surtout assumé (les vacances, par exemple, ou encore lorsqu’on a besoin de repos après une journée de travail). Le consommateur met à distance cette culture, puisqu’il y a des « circonstances atténuantes ».

 

_ Il existe une autre « excuse » pour justifier la pratique de cette culture. Il s’agit du contexte relationnel et matériel. On va faire une chose pour faire plaisir à un proche (relationnel) ou parce qu’on n’a matériellement pas le choix (matériel), en dépit de ses propres goûts (lire tel livre parce qu’il ne restait que celui-ci par exemple).

 

_ Egalement, lorsqu’un bien ou une pratique est gratuit, on a moins de scrupules à le consommer, même s’il est illégitime, que lorsqu’il est payant.

 

Ces justifications n’existeraient pas si les hiérarchies, les dominations et les inégalités culturelles n’avaient pas d’effets sur les individus. En effet, elles amènent à se distinguer par rapport aux autres, et également par rapport à soi.

 

L’opposition culture légitime/culture illégitime n’a de valeur que dans un espace social et culturel donné. En effet, au fil du temps, on constate une évolution dans la hiérarchie  culturelle. Par exemple, en Amérique du nord, dans la première partie du XIXème siècle, les œuvres de Shakespeare étaient considérées comme du divertissement populaire. Progressivement, elles vont basculer dans la culture légitime et être plutôt réservées à des connaisseurs (de même pour la musique classique). Ensuite, de nouveaux changements s’opèrent : En 1870, le théâtre américain était similaire au théâtre londonien, c’est-à-dire bourgeois et présentant des pièces classiques. En 1880, il devient plus populaire, pour toucher un public plus diversifié. Depuis les années 1980, la séparation des genres (classique/rock, par exemple) est fortement remise en cause. C’est ainsi que l’on peut retrouver des graffitis exposés dans des musées. La plupart du temps, il s’agit d’un anoblissement (donc de l’illégitime vers le légitime). Egalement à partir des années 80, les individus puisent leur culture dans ces deux catégories.

 

Pour établir le degré de légitimité culturelle d’une pratique, il est possible de réaliser une enquête sur les écarts culturels entre cadres et ouvriers non qualifiés. Les résultats nous permettent de remarquer les pratiques, les préférences, les consommations culturelles dont résultent les écarts les plus importants. Cependant, le degré de légitimité culturelle peut être remis en cause car personne ne détient le monopole de la fixation de ce degré. De plus, lors d’une classification comme celle-ci, il existe un « vague », c’est-à-dire qu’il faudrait des précisions sur les activités pour faire ressortir la légitimité (par exemple : lire beaucoup est une activité légitime, mais lire des romans d’espionnage ou d’aventure ne l’est pas).

 

II-            Construire les profils individuels et culturels

 

Les sociologues bâtissent des catégories en fonction des mots donnés par la société (hommes/femmes, riches/pauvres, lettrés/illettrés…) Ces définitions peuvent alors donner une vision fixe et fausse du monde social et des individus qui le forment, surtout qu’ils ne rentrent pas dans une seule catégorie.

 

Les mixités sociales et culturelles sont les plus difficiles à catégoriser. Par exemple, on catégorise deux types d’étudiants : ceux qui travaillent à en oublier de se sociabiliser, et ceux qui tendent plus vers la fête et ne travaillent pas. On appelle ça des idéal-typiques (deux profils extrêmes), ce qui veut dire que la majorité des étudiants sera entre les deux. Les risque de ce type d’enquête est la généralisation, la caricature des groupes, simplement parce que, statistiquement, ils tendent plus que d’autres vers des figures idéal-typiques.

 

Notion de transfert : signifie qu’un individu attiré par une pratique culturelle légitime dans un domaine a plus de chance d’être attiré par une pratique légitime dans un autre domaine. Lorsque ce n’est pas le cas, le transfert est dit imparfait.

 

Malgré les changements constatés lors des dernières décennies, le niveau de diplôme et l’origine sociale demeurent des variables déterminantes pour comprendre l’intensité et les formes que prend l’intérêt pour la culture.

 

Un profil consonant est constitué du nombre maximal de variables (selon l’enquête) légitimes ou peu légitimes, une variable étant par exemple une consommation culturelle. Un profil dissonant contient une combinaison de traits légitimes et peu légitimes.

 

Plus on utilise de variables, moins on va trouver de profils identiques. De plus, les variables renvoient à des registres culturels différents, il peut donc y avoir des mélanges culturels. Le nombre de profils consonants diminue, le risque de voir apparaître des dissonances culturelles augmente donc. Toutes les statistiques montrent qu’un individu ne reste pas figé dans un registre culturel donné, de basse ou haute légitimité.

 

III-          Les profils culturels en portraits

 

En France, les cadres et les professions intellectuelles supérieures, les professions intermédiaires et les plus de 45 ans sont plus susceptibles d’avoir un profil consonant très légitime (dit « par le haut »). Malgré ses statistiques, il est tout de même plus probable de trouver des profils consonants peu légitimes que très légitimes.

 

Les enquêtes sur les pratiques culturelles des français permettent de se rendre compte de la diversité des investissements culturels à l’échelle individuelle.

 

Parfois, une même consommation culturelle peut être considérée comme peu légitime en milieu populaire et très légitime en haut milieu. En fonction du cas dans lequel on se place, on va dire qu’il y a une correspondance directe entre la consommation et le groupe ou qu’il y a une mise à distance volontaire de la part de l’individu. Tout est une question de premier ou second degré. Prenons l’exemple de la bande dessinée. En milieu populaire, elle n’a pas de grande valeur culturelle, c’est une consommation illégitime, tandis qu’en haut milieu, la bande dessinée peut être associée à une prise de liberté.

 

Face à cette diversité de profils culturels, on peut employer le terme « omnivores », bien qu’il ne soit pas réellement approprié puisque les consommateurs culturels n’achètent pas indifféremment les biens des différents registres culturels (omnivore signifie se nourrir d’aliments indifféremment).

 

Les pratiques et préférences culturelles des individus dépendent :

 

_ Du milieu social d’origine (du père, de la mère)

 

_ Du sexe

 

_ Des institutions sociales, politiques, religieuses et culturelles

 

_ De la scolarité

 

_ De la situation professionnelle

 

_ De la situation conjugale

 

_ Des groupes de pairs

 

_ De l’âge

 

C’est dans la classe supérieure qu’on est le plus susceptibles de rencontrer des profils dissonants. Ils sont protégés des effets du jugement culturel négatif, grâce à leur statut social. Ils peuvent alors cultiver une forme d’anti-intellectualisme, sans pour autant rejeter la culture légitime.

 

Les classes moyennes peuvent également avoir des profils dissonants parce qu’ils font des mélanges des cultures légitimes et illégitime, ils occupent une position intermédiaire.

 

Les profils dissonants des classes populaires sont dus à des incursions régulières dans la culture légitime (grâce à l’école, par exemple), plutôt qu’à une réelle attirance vers la légitimité.

 

IV-          Mobilités et influences

 

Certains profils dissonants s’expliquent par des situations de mobilités sociales, scolaires ou professionnelles (l’individu n’a pas le même statut social ou niveau scolaire que ses parents, ou a changé de position dans la hiérarchie professionnelle). En « montant », on comprend le sens du haut et du bas, de la hiérarchie.

 

Chaque profil culturel est marqué par les différentes expériences socialisatrices (hiérarchie sociale, scolaire, professionnelle), mais aussi par les influences relationnelles (amis, conjoint, etc…).

 

Les élèves et les étudiants ont le plus de chances d’avoir un profil dissonant, car ils mélangent toutes sortes de connaissances et de pratiques venant de registres culturels différents pouvant amener à une mixité culturelle. La période adolescente est marquée par des contraintes multiples (scolaires, parentales, liées à la fratrie ou au groupe de pairs), favorisant ainsi les mélanges de cultures. Cependant, avec la sortie de ces cadres après l’adolescence, ces mélanges déclinent. 

 

Les enfants de classe supérieure savent hiérarchiser les pratiques culturelles. Les enfants de classe populaire, eux, sont dirigés vers la culture légitime par l’école et la culture illégitime par l’entourage.

 

V-            Dévaluation du capital littéraire et artistique, divertissement et mélange des genres (au cours des trente dernières années)

 

Les cadres, par exemple, vont se diriger vers la culture en rapport avec leur secteur d’activité, et non plus vers la littérature ou l’art. De plus, les matières scientifiques, comme les mathématiques, sont plus valorisées à l’école. Le capital littéraire et artistique est également dévalué à cause de la télévision qui ne propose pas de programmes culturels légitimes.

 

En effet, tout individu cherche le relâchement après une journée de travail, quel que soit l’âge ou la situation sociale. Cela survient dans un temps limité (après le travail). La télévision propose donc des programmes peu légitimes sous prétexte de répondre à un besoin de décontraction de la part des consommateurs.

 

Désormais, les genres sont mélangés. Sur les plateaux de télévision, les intellectuels côtoient les comiques, et la musique classique est utilisée dans les publicités.

 

 Conclusion

 

Les individus voient l’opposition légitime/illégitime comme une séparation des groupes et des individus au sein même d’un groupe, mais également de soi (ce qui permet de maîtriser la notion de légitimité). Ces variations de comportements culturels permettent d’éviter une caricature du monde social et des groupes.

 

Des écarts culturels « vers le haut » ou « vers le bas » amènent à des profils dissonants, qui, bien que beaucoup plus fréquents que les profils consonants, n’en deviennent pas plus enviables. La dissonance n’est jamais réellement assumée, puisque les consommations illégitimes sont justifiées et celles légitimes, vantées (on se distingue des autres).  La société est donc assez hétérogène culturellement parlant, puisque la majorité des individus mélange le légitime et l’illégitime. Il y a une lutte en tout individu, car il rejette la facilité (l’illégitime), mais reste tout de même tenté par elle.

 

Des sous et des hommes

Par Virgile H

 

L’idée principale évoquée dans ce livre est une vision atypique de l’économie. L’auteur, Jean-Marie Albertini, étudie dans ce livre les questions que les non-économistes se posent le plus souvent sur l’économie. Ainsi il oriente son discours autour d’une idée, une interprétation différente de la plupart des économistes : la monnaie, et à plus forte raison l’économie, tout comme la religion ou la politique,  ont été créé dans le but de détourner la violence des hommes sur autre chose. En effet la loi du plus fort, qui prédomine chez les animaux et maintient une hiérarchie essentielle à la survie de l’espèce, ne fonctionnant plus chez l’homme avec le développement de l’intelligence, (le rusé peut tuer le plus fort dans son sommeil) pour éviter la destruction de l’espèce humaine, il fallut trouver un moyen de détourner ce désir de ressembler au plus puissant, voire d’être le plus puissant (amenant à tuer le plus puissant pour s’approprier sa personne et son pouvoir). La monnaie fut donc créée avec l’effigie du plus puissant. Par ce stratagème, le citoyen romain (par exemple) pouvait s’approprier un peu de la personnalité de l’empereur.

 

En plus de détourner la violence et de faciliter l’échange, la monnaie devient un objectif pour l’homme. Celui-ci accepte de travailler pour avoir, en retour, de la monnaie qui lui permettra de satisfaire ses besoins. Mais ces besoins ne sont pas des nécessités, ce sont des désirs. Les seuls besoins nécessaires sont ceux lié à la survie (boire, manger, …), l’homme a des désirs. Les désirs créent le besoin. On produit pour se procurer de la monnaie, non pour satisfaire des besoins. Les objets échangés deviennent donc des marchandises (donc des biens produits pour être échangés contre de la monnaie). Si les objets deviennent des marchandises, les besoins s’expriment par la consommation (c’est-à-dire la répartition de la dépense monétaire en achat de marchandises).

 

La production, en proposant de nouveaux biens, créé de nouveaux désirs, tout en veillant bien à ne pas développer chez les consommateurs des désirs qu’elle ne peut pas satisfaire. Le consommateur en vient donc à ne désirer que le possible. C’est là que la notion de rareté devient importante. La rareté n’a rien de « naturel », elle n’a pas de sens sinon dans l’économique. La rareté économique est la volonté de posséder ce que l’autre possède pour mieux l’imiter. Pour éviter que le désir ne se porte directement sur lui, l’autre nous incite à désirer l’un de ses biens. Il accroit notre désir des choses en faisant semblant de nous les refuser. Cette quête de la rareté détourne notre violence non supprimée (la monnaie détourne la violence, elle ne la supprime pas). Le désir, grâce à la monnaie, n’engendre plus le vol du bien mais incite à l’acquisition de plus de monnaie. Le consommateur va donc produire activement dans le but d’amasser assez de monnaie. Chaque progrès technique favorise la rareté car elle fait apparaitre de nouveaux produits, donc de nouveaux désirs, donc de nouveaux besoins. La rareté nous oblige à toujours aller plus loin, provoque la croissance et le progrès.

 

Mais si la rareté existe, tous les objets n’ont pas la même valeur ni le même prix. Le prix se fixe grâce à la loi de l’offre et de la demande. Mais la valeur est différente. Il y a deux types de valeurs, la valeur d’usage : un objet quelconque peut avoir une valeur inestimable pour vous (l’histoire de l’objet) alors qu’il peut être un objet tout à fait anodin pour toute autre personne. L’autre type de valeur est la valeur d’échange (je reprends ici l’exemple de l’auteur) : « ainsi, un galet artistiquement peint, vendu par un marchand de souvenirs de la plage de Palavas-les-Flots à une valeur reconnue par tous. Elle dépend du nombre de boutiques de Palavas-les-Flots, de leur accord plus ou moins tacite afin de ne pas se faire concurrencer, de leur prix de reviens et du nombre de consommateurs susceptibles de l’acheter pour l’offrir à leurs connaissances » (les rapports de forces). Il n’y a cependant pas de valeur d’échange sans valeur d’usage, la valeur d’usage contribue à ce qu’un bien devienne économique, ait un  prix, une valeur d’échange.

 

L’auteur s’intéresse donc ensuite à la mécanique des prix des biens. Il s’intéresse premièrement à l’inflation et à la stagflation (situation économique caractérisée par une croissance de l'activité nulle ou très faible et une inflation). Si une entreprise possède une grande part du marché (ou est en situation de monopole), elle peut augmenter ses prix et surtout les fixer à la hausse après la « foire d’empoigne » (lutte entre les acteurs de l’économie pour fixer le prix d’un bien). C’est à ce moment qu’intervient le « système de la gifle ».

 

Il y a quelques décennies, lorsqu’une entreprise donnait une « gifle » à une autre (augmentait les prix en situation de concurrence), l’autre la lui rendait (elle s’assurait que les autres entreprises n’augmentent pas leurs prix et forçait la première entreprise à rétablir les prix d’avant). Un acteur de l’économie donnait une « gifle » à un autre et ce dernier la lui rendait. Aujourd’hui, lorsqu’une entreprise donne une « gifle » à une autre, cette dernière va en donner une à son tour, à un tiers (une autre entreprise), en essayant de donner une « gifle » plus forte que celle qu’il a reçue. Le système de la « gifle » fait donc circuler la « gifle » de l’inflation jusqu’à ce qu’un « giflé » ne puisse pas la rendre assez fortement à un autre ou qu’il ne trouve personne à qui la donner. Ainsi ce dernier « giflé » a le rôle d’amortisseur de l’inflation. Les agriculteurs occupèrent pendant longtemps ce rôle d’amortisseurs de l’inflation, c’est-à-dire que les prix agricoles montaient moins vite que les autres, le revenu total des agriculteurs diminuait, mais le nombre d’agriculteurs diminuait encore plus vite. Donc le revenu par tête des agriculteurs s’accroissait malgré leur rôle d’amortisseurs de l’inflation. Mais lorsque les agriculteurs furent trop peu nombreux pour supporter ce rôle, leurs revenus totaux diminuèrent, ils protestèrent. Lorsque la « gifle » circule, c’est la stagflation.      

 

L’auteur s’intéresse également à l’irrésistible baisse des prix. Avec le temps, la plupart des biens perdent de la valeur (même pendant une période d’inflation, les biens coûteront plus cher mais leur valeur baissera, proportionnellement aux autres). Le prix d’un bien ne cessera de diminuer, mais pour profiter de cette irrésistible baisse des prix, il faudrait vivre avec un temps de retard (un téléphone coûtera à priori moins cher 10 ans après sa sortie qu’à sa sortie).    

 

 

 

L’auteur nous dit ensuite que les économistes établissent des prévisions. Les prévisions n’étant pas des prédictions, il y a toujours une part de hasard qui pourrait bien tout changer. En fonction des idées que prônent les économistes (classique, néo-classique ou hérétique), ils tenteront de prévoir un avenir plus ou moins vaste. Les hérétiques (l’auteur se qualifie lui-même d’hérétique de l’économie)  sont ceux qui se compliquent le plus la tâche en voulant prévoir sur le long terme et en essayant de prendre en compte tous les facteurs. Pour Albertini, qui est un hérétique de l’économie, le hasard ne doit pas nous empêcher de prévoir l’avenir économique, mais il doit être pris en compte. C’est pour cette raison que les prévisions sont très dures à faire et qu’elles peuvent s’avérer partiellement ou totalement fausses.

 

Albertini termine son œuvre en rappelant qu’il n’y a pas qu’une seule vérité et surtout, que chacun à sa vérité. C’est d’ailleurs pour cette raison que les smithiens, les keynésiens ou encore les marxistes ne sont pas souvent d’accord entre eux. L’économie peut être étudiée sous bien des points de vue.  

 

 

 

Bien sûr, c’est un résumé, l’auteur aborde bien d’autres notions mais les plus importantes (et celles que vous ne connaissez peut être pas) sont dans ce résumé. Soit dit en passant, c’est un très bon livre de vulgarisation économique que je conseille si vous en avez l’envie et le temps.  

 

 

 

 

 

 

La monnaie et ses mécanismes,  Dominique Plihon

 

Jeanne T

 

 

 

 

              « La monnaie est l’un des instruments les plus utilisés dans notre vie quotidienne »,  en effet d’après Dominique Plihon, la monnaie a une place centrale dans notre système économique. Celle ci remplit une triple fonction : c’est une unité de compte, un instrument de paiement et une réserve de valeur.

 

              Rappel de la signification des trois fonctions :

 

·       Unité de compte : Elle permet de mesurer la valeur des biens et services

 

·       Instrument de paiement (=Intermédiaire dans les échanges): Elle permet d’acquérir immédiatement des biens et services sans coûts de transaction

 

·       Réserve de valeur : C’est un actif qui ne perd pas de sa valeur (si et seulement si le taux d’intérêt est inférieur au taux d’inflation)

 

Dominique Plihon est professeur d'économie à l'université Paris-Nord où il dirige le DESS " Banque, finance, gestion des risques ". Il a occupé des fonctions d'économiste à la Banque de France et au Commissariat général du Plan. Il a notamment publié Les taux de change (collection Repères, nouvelle édition, 1999).

 

Cet ouvrage revient sur les définitions et les mécanismes de base de la monnaie. Les chapitres détailleront successivement les origines de la monnaie, l'explication de la politique monétaire ainsi que le rôle des banques et les questions financières internationales.

 

 

 

 

I.                    La monnaie, instrument de paiement

 

A.      Évolution des formes de la monnaie

 

 

 

La première monnaie était sous forme de biens et avait une valeur intrinsèque : la monnaie-marchandise (coquillages, bétail puis vers l’Antiquité, métaux précieux). Puis, la monnaie métallique est apparue, passant par trois étapes : la monnaie pesée (lingots ayant un certain poids, 2000 av JC), comptée (lingots divisés en pièce, plus simple, 800 av JC) et enfin frappée (valeur de la pièce en unité de compte fixée par son poids en métal). L’or était donc au centre du système monétaire international. Cependant, la monnaie papier (=monnaie fiduciaire, billets) se développe en parallèle depuis le XVIIème  pour ensuite occuper une place majeure. En effet, au départ, les billets ne sont que de simples certificats représentatifs de métaux précieux, ils ont une valeur faciale et non intrinsèque. Au fil du temps, les banques émettent plus de certificats que d’or par conséquent, le volume de certificats et supérieur au volume d’or. Les banques se basent donc sur l’hypothèse que toute la population n’aille pas chercher son or en même temps. Pour éviter ce risque, l’État fait décider le « cours légal » du billet : la loi définit l’équivalent-or des billets au même titre que les espèces métalliques. On ne peut refuser le billet.

 

Enfin, la monnaie scripturale (somme inscrite au crédit du compte courant, donc principalement utilisée par les banques de 2nd rang) issue des lettres de change apparues au XIVème, se développe considérablement pour devenir le point central de notre système monétaire.

 

 

 

B.      Les moyens de paiement actuels : prédominance de la monnaie scripturale

 

 

 

Le développement rapide de la monnaie scripturale, dont la part dans les moyens de paiement est passée de 58% à 90% de 1960 à 2007, s’explique par des raisons de commodité (les règlements par jeux d’écriture évitent les déplacements), et de sécurité (la preuve du paiement apparaît dans la comptabilité des banques).

 

Il existe plusieurs instruments de circulation de la monnaie scripturale :

 

·       Les instruments papiers : le chèque bancaire, le virement bancaire, les effets de commerce (titres de crédit interentreprises qui fonctionnent sur les mêmes principes que la lettre de change)

 

·       Les instruments automatisés : le virement automatisé (salaire, loyers,…), le prélèvement automatique, la carte bancaire

 

·       La monnaie électronique : (ensemble des techniques informatiques, magnétiques, électroniques  et télématiques permettant l’échange de fonds sans support de papier) le porte-monnaie électronique, le porte monnaie virtuel

 

On observe donc une dématérialisation progressive des moyens de paiement.

 

 

 

C.      Le processus de création monétaire

 

 

 

De la monnaie est créée lorsque:

 

·       La banque autorise un compte débiteur ou octroi un crédit (crédit à la consommation, crédit à l'investissement, crédit immobilier, crédit de trésorerie)

 

·       Les agents économiques résidents échangent des devises contre de la monnaie intérieure (une devise étrangère est un titre de créance sur l'étranger)

 

·       La banque achète un actif réel (immeuble par exemple) ou un actif financier (achats d'actions, achat d'obligations publiques ou privées)

 

 

 

II.                 La monnaie, actif de patrimoine, et ses substituts

 

 

 

La monnaie a l’avantage d’être l’actif le plus liquide (être immédiatement disponible et sans risque, sauf cas d’inflation).

 

 

 

A.      La gestion de patrimoine

 

 

 

 

Patrimoine

Actifs

Dettes

Actifs réels

Actifs financiers

Avoirs monétaires

 

Biens de productions

Biens de consommation durable

Titres à long terme (marché des capitaux)

Titres à court terme (marché des capitaux)

La monnaie sous ses différentes formes

 

           

 

 

Un individu va répartir son patrimoine de sorte à ce que celui-ci lui procure une satisfaction maximale. Pour ceci, deux critères sont pris en compte : le risque (d’insolvabilité, de taux d’intérêt, de capital, d’illiquidité) et le rendement des actifs (rendement d’usage, rendement financier).

 

La monnaie se distingue des actifs réels et financiers car elle ne présente aucun risque cité précédemment, il est sans risque -> actif liquide.

 

Les caractéristiques d’un actif liquide :

 

·       Sa valeur nominale est stable

 

·       Il est immédiatement disponible

 

Ces propriétés expliquent pourquoi les agents économiques cherchent à détenir une partie de leur patrimoine sous forme de monnaie. Ces derniers la favorisent également par incertitude de la conjecture.

 

D’autres facteurs interviennent dans la demande de monnaie, la théorie de la « préférence de la liquidité » de Keynes en constitue le point de départ :

 

·       Motif de transaction : besoin de monnaie pour faire face aux dépenses courantes

 

·       Motif de précaution : faire face aux imprévus budgétaires

 

·       Motif de spéculation : choix des agents économiques entre liquidité et placement

 

 

 

B.      Monnaie et actifs financiers liquides : les agrégats monétaires

 

 

 

Actifs financiers liquides : actifs qui rapportent un revenu financier, sont peu risqués et peuvent facilement être transformés en moyens de paiement. (Ex : créances à court terme, titre à court et moyen termes)

 

 

 

Agrégats monétaires :

 

·       M1 = Monnaie au sens strict = ensemble des moyens de paiement directement utilisables (= parfaitement liquides)

 

·       M2 = M1 + livrets d’épargne (ces livrets sont mobilisables immédiatement et sans risque, mais ils ne peuvent effectuer directement des paiements = quasi-monnaie)

 

·       M3 = M2 + placements mobilisables sans délai mais qui comportent une incertitude quant à la valeur de leur vente

 

 

 

III.              La circulation de la monnaie

 

A.      Le circuit simplifié de la monnaie

 

 

 

La circulation de la monnaie dans l’économie est déterminée par les principales opérations économiques (production, consommation, épargne).

 

L’essentiel :

 

·       Les banques créent la monnaie

 

·       Les entreprises l’empruntent

 

·       Les ménages la dépensent ou l’épargnent

 

 Le circuit démarre par une création monétaire lorsque

 

les banques prêtent aux entreprises puis se boucle par

 

 une destruction de monnaie avec le remboursement

 

de ces emprunts.

 

B.      Les trois sources de la création monétaire

 

 

 

En réalité, deux autres agents sont à intégrer à ce circuit : L’État et l’extérieur. L’État émet des bons du Trésor qui sont achetés par les banques afin de « monétiser » sa dette publique. L’extérieur, quant à lui, correspond à toutes les opérations monétaires avec l’étranger. Ainsi, les trois sources de création monétaire correspondent aux opérations de financement du système bancaire avec l’extérieur, l’État et l’économie (entreprises et ménages). Ces sources sont également appelées contreparties de la masse monétaire.

 

 

 

IV.               La monnaie et les banques au cœur de la finance moderne

 

A.      Le passage à l’économie de marchés financiers libéralisée

 

 

 

Jusque dans les années 80, le système financier est largement contrôlé par les pouvoirs publics et l’essentiel du financement de l’économie provient de crédits octroyés aux banques et institutions financières spécialisées. On appelle ceci l’économie d’endettement administrée. Toutefois, depuis le milieu des années 80, un nouveau système financier se met en place. Une libéralisation financière radicale est mise en place avec la privatisation des banques et des institutions financières. De plus, le marché unique des capitaux apparaît. On appelle ceci un économie de marchés financiers libéralisée.

 

 

 

B.      Le marché des capitaux

 

 

 

Le marché des capitaux regroupe le marché monétaire (capitaux à court et moyen termes) et financier (capitaux à long terme).

 

 

 

Marché des capitaux

Marché financier (actions, obligations)

Marché monétaire

Marché Primaire

(sur lequel les titres sont émis pour la 1ère fois)

Marché secondaire

(sur lequel les titres changent de main)

M. interbancaire

(réservé aux banques)

Au sens large (titres de créances négociables)

       

 

 

 

              C. L’évolution des situations et des comportements financiers

 

 

 

Avec l’apparition du marché des capitaux, de nouveaux comportements émergent. En effet, les États et entreprises choisissent désormais de lever massivement des fonds par émission de titres. Il y a une diversification des sources de financement, le financement direct est très prisé.

 

Quant aux banques, leur importance dans le financement de l’économie a diminué, c’est la désintermédiation bancaire.

 

 

 

V.                 La dimension internationale des monnaies

 

 

 

La libéralisation financière a aboli les frontières entre les espaces nationaux. Ceci a abouti à la création d’un marché planétaire des capitaux : c’est la globalisation financière.

 

 

 

A.      Le marché des changes, un marché planétaire

 

 

 

La monnaie circule sur deux grands marchés : le marché international des capitaux et le marché des changes. Trois groupes d’acteurs économiques interviennent sur ce dernier : les entreprises, les banques centrales et les banques de 2nd rang.

 

Le marché des changes : Marché sur lequel se retrouvent tous les participants désireux de vendre ou d’acheter une devise contre une autre. Dans le jargon financier, il est souvent question du Forex pour désigner le marché des changes : contraction des termes anglais FOReign EXchange.

 

 

 

B.      Les relations entre les monnaies à l’échelle internationale

 

 

 

Les monnaies sont souvent comparée grâce à la théorie du PPA (Parité du pouvoir d’achat des monnaies). La valeur d’une monnaie est déterminée par le montant de biens et services qu’elle permet d’acquérir dans son pays d’émission par rapport à ce qu’elle permet d’acheter à l’étranger.

 

 

 

C.      Le système monétaire international

 

 

 

Le système monétaire international (SMI) organise les relations monétaires internationales. Ses trois fonctions sont :

 

·       Assurer l’échange et la circulation des monnaies

 

·       Permettre l’ajustement des balances des paiements (ajustement du déficit et de l’endettement de certains pays)

 

·       Assurer l’alimentation en liquidités internationales (fournir à l’économie mondiale la monnaie nécessaire aux échanges internationaux de biens, de services et de capitaux.

 

 

 

VI.               La politique monétaire

 

A.      Les objectifs de la politique monétaire

 

 

 

La politique monétaire contribue à la régulation macroéconomique.

 

 

 

Objectifs de la politique monétaire

Objectifs opérationnels

Objectifs intermédiaires

Objectif finaux

Variables indicatrices de l’état de la politique monétaire

è Les agrégats monétaires

è Les taux d’intérêt

è Les taux de change

è Stabilité des prix

è Croissance économique

è L’équilibre extérieur

Le plein emploi

 

 

 

B.      Les instruments de la politique monétaire

 

 

 

 

 

Les techniques de contrôle administratif et quantitatif (agissent de manière directe)

Les techniques de marché (agissent indirectement)

Le contrôle du crédit

Le contrôle des changes

Création de monnaie banque centrale

Les réserves obligatoires

Limiter le crédit distribué par les Banques

Limiter ou interdire certaines opérations susceptibles de nuire à la stabilité des changes

Permet d’agir simultanément sur le niveau des taux d’intérêts et sur la quantité de monnaie centrale offerte aux banques de 2nd rang

Pourcentage des dépôts reçus que les banques de 2nd rang doivent conserver sur un compte à la banque centrale

 

 

 

             

 

              CONCLUSION :

 

 

 

Ainsi, la monnaie constitue l’innovation majeure de notre système économique. Instrument d’échange accepté par tous car il inspire confiance et sa valeur est stable, la monnaie est le seul bien pouvant être échangé à tout moment contre les autres biens : c’est un bien liquide. Toutefois, la monnaie a également une dimension sociale et politique. En effet, l’Histoire de France montre que notre pays a été politiquement unifié et s’est constitué en un véritable espace économique lorsqu’une monnaie et un moyen de paiement unique ont émergé sur le territoire. De plus, la monnaie renforce le sentiment d’appartenance à une nation.

 

Cet ouvrage à portée pédagogique revient sur les définitions et les mécanismes de base de la monnaie. Des origines de celle-ci à l'explication de la politique monétaire, du rôle des banques aux questions financières internationales, tout est expliqué clairement et de manière didactique. 

 

 

 

             

 

 

 

 

 

             

 

 

 

 

Penser l'Etat, Philipe Braud

par Clara O

 

Philippe Braud est un spécialiste de sociologie politique. Ancien directeur du département science politique à la Sorbonne, il est professeur des universités à l'institut d'études politiques de Paris. Il a écrit de nombreux ouvrages dont « Penser l'État », qui a été publié en 2004. C'est cette science politique et l'Etat que nous allons étudier dans cette fiche de lecture. Pour cela nous nous baserons sur les trois approches qu'il a choisis, soit : la théorie, dégager les critères pertinents de cet objet conceptuel, le situer dans la perspective de l'histoire et enfin porter un regard sociologique sur les réalités du concept.

 

 

 

Première partie:

 

La Théorie  

 

 

 

            A travers cette partie, P.Braud tente de répondre à plusieurs questions : "qu'est-ce qu'un bon gouvernement?" "Sur quoi fonder la légitimité du pouvoir de l'Etat?" et enfin "Quelles en sont les limites?"

 

 Pour les théoriciens du droit, il n'est possible de "penser l'Etat" qu'à partir de ses activités législatives (initiative des lois), administratives et juridictionnelles. Il différencie l'Etat et la société civile, en effet la notion de société civile (qui émerge au XVIII) est articulée à celui de l'Etat. Pour les juristes de droit international, l'enjeu principal est d'identifier les acteurs à part entière de la société.

 

L'Etat est une institution politique et administrative qui entretient un rapport étroit avec une norme juridique:

 

- le parlement vote la loi

 

-le pouvoir exécutif arrête diverse catégories d'actes règlementaires.

 

Néanmoins l'Etat est soumis au droit (respect des libertés...).

 

Philipe Braud évoque également les enjeux de la souveraineté a la suite de sa question.                                                                                          

 

La conception juridico-politique doit son succès à  sa capacité d'offrir une solution à trois types de problèmes: la légitimation du pouvoir politique dans une société laïcisé, l'ordre juridique et enfin la théorie de la souveraineté.

 

L'Etat et le problème de la contrainte sont exposés et appuyés sur les paroles de Max Weber. En effet, il considère que son approche est l'antithèse de celle d'Emile Durkheim. Pour celui-ci "le droit reproduit les formes principales de la solidarité sociale". Ainsi, l'Etat serait un agent de la conscience collective. Max Weber opte pour un choix bien différent. Il insiste sur les antagonismes de la société. Le recours à la contrainte physique n'est pas l'unique moyen d'action des gouvernants qu'ils utilisent pour imposer leur volonté, cette analyse n'est pas moindre puisqu'elle anticipe de fausses interprétations de la pensée wébérienne.

 

On arrive par la suite à des enrichissements anthropologiques, le caractère commun à tous les Etats est d'être des institutions fondé sur la contrainte mais ils ne s'appuient pas sur elle seule, et elle n'est ni la priorité. L'acceptation du contrôle social de l'état est soutenue par le sentiment d'appartenance à une communauté de destin dont l'Etat serait l'expression politique.

 

De plus, l'Etat serait le représentant de l'intérêt général. Philipe Braud nous fait part de quelques exemples, notamment l'école avec l'éducation civique ou l'histoire, dans la vie politique avec le "service public"... L'Etat est perçu avant tout comme le "protecteur" de la communauté face aux menaces extérieures, aux inégalités et protecteurs des plus démunis. Ainsi, cette vision de l'Etat associée a l'intérêt général à longtemps été combattu par l'interprétation marxiste.

 

·      l'Etat, bouclier ou creuset de la nation?

 

La formule "l'Etat est la nation juridiquement organisée" présente un type de rapport entre deux concepts qui se révèle réducteur. La nation serait "une réalité première" dont l'Etat deviendrait la structure de l'organisation. Au cœur de ses frontières, l'action éducative de l'Etat tend à introduire une instruction publique qui uniformiserait les particularités du tissu social.

 

 Après nous avoir présenté la science politique de l'Etat sur le plan de la théorie afin de dégager les critères pertinents de cet objet, il s'agit de se situer dans la perspective de l'histoire. Le problème sera de cerner ses conditions d'apparition et de diffusion.

 

 

 

Deuxieme partie:

 

L'Histoire

 

 

 

                Le problème de savoir s'il a existé "des sociétés sans Etats" a souvent été abordé de manière confuse.  Pierre Clastre, anthropologue, a consacré un livre sur ce problème mais se posait en réalité une autre question : "peut-on découvrir dans des micros communautés l'absence totale d'un pouvoir de régulation collective ?"

 

Selon la définition juridique et sociologique, L'Etat est une production historique attestant le franchissement d'un seuil minimal de division sociale de tâches.

 

Il existe une grande diversité historique de processus d'émergence étatique, dans les airs culturels d'Europe, d'Afrique précoloniale ou d'Amérique précolombienne. P.Braud privilégie ici l'histoire occidentale de l'Etat.

 

Il débute ce chapitre par l'aventure occidentale de l'Etat. En effet, à la suite du partage de l'empire de Charlemagne, L'Europe se prépare à connaitre son plus haut niveau de fragmentation politique. L'émergence de l'Etat suppose la construction d'un centre qui petit à petit impose à ses concurrents son double monopole : prescrire le droit applicable et celui de recourir a la contrainte pour en garantir l'effectivité.

 

On peut distinguer trois niveaux de lutte concurrentielle :

 

·      militaire

 

·      économique

 

·      symbolique

 

Ainsi, l'Union Européenne actuelle est née en partie d'une volonté d'institutionnaliser la réconciliation définitive des peuples auparavant ennemis.

 

Les ressorts économiques de la croissance étatique

 

Pour s'imposer avec efficacité, l'Etat moderne a eu besoin de ressources appropriées qu'il trouvait dans son environnement. Ainsi, son aire privilégié de son émergence se trouve dans l' "économie-monde" occidentale (Wallenstein).

 

Le coût politique des prélèvements opérés reste élevé, le pouvoir politique (disposant de ressources trop étroites) n'aura pas les moyens de construire un appareil administratif compétant. L'Etat apparait comme coûteux et inefficace, sa légitimité en est donc affaiblie. L'Etat occidentale moderne s'est affirmé historiquement contre les deux puissances qui dominaient l'univers symbolique soit le Pape et l'Empereur. Pour que l'Etat devienne un Etat moderne, il ne fallait pas que les citoyens soient soumis à ceux qui gouvernent celui-ci. De plus, la complexification de la structure gouvernementale s'impose au fur et à mesure que les affaires à traiter deviennent plus nombreuses et plus diversifiés.  

 

P.Braud évoque par la suite la mondialisation du phénomène étatique. En effet, 193 Etats siègent à l'ONU (depuis 2011) rassemblent des acteurs égaux à l'internationale. Malgré de nombreux contrastes qui les différencient ils partagent des apparences communes puisque ils constituent tous des ordres juridiques s'imposant sur un espace circonscrit et organisé autour d'un "centre politique" qui leur est propre.

 

Dans quelles mesures demeure-t-il pertinent de penser l'Etat comme une forme politique "universelle"?

 

Dès le XIXème siècle, le mouvement de modernisation dans certain pays indépendants d'Asie ou du Proche-Orient s'est tourné vers l'Occident pour s'inspirer de quelques méthodes. On distingue plusieurs processus historiques qui expliquent l'expansion contemporaine de l'Etat hors de son berceau initial, suscitant des adaptations ou distorsions.

 

·      l'importation délibérée : Au XIX et XXe siècles, deux pays constituent les exemples emblématiques d'une attitude qui est  d'emprunter les moyens de la puissance Occidentale.

 

·      l'héritage colonial : la décolonisation à laissé un semis de petits Etats, leur indépendance semble souvent problématique  et leur mode de fonctionnement révèle les apparences d'un Etat uniforme.

 

Il poursuit cette étude en détaillant les spécificités latino-américaines

 

 

 

troisième partie:

 

sociologie

 

 

 

Philippe Braud entame par la suite sa troisième partie, concernant la sociologie.

 

Il porte en effet un regard sociologique sur les réalités concrètes du concept. Il choisira plusieurs directions de recherches:

 

La première catégorie concerne la mobilisation des moyens à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs de l'Etat. On verra alors un point de vu économique plus présent que dans les autres parties, avec l'évocation de l'entreprise.

 

La seconde catégorie révèle les modalités d'exercices de son pouvoir de direction et de contrôle. Le premier chapitre de cette partie est l'Etat comme entreprise: il affirme que l'entreprise comporte autant de risques que d'inconvénients. De plus l'Etat ne peut être assimilé à une entreprise privée, car il détient un pouvoir juridique d'injonction qui lui permet de se procurer des ressources selon des modalités spécifiques.

 

·      la capacité d'un Etat à mobiliser les ressources humaines et les moyens matériels constituent un bon indicateur de son efficacité et de sa légitimité.

 

    De plus, le niveau de prélèvements opérés ne dépend pas du niveau de richesse du pays, de la force ou de la faiblesse de l'Etat. Dans un pays comme la France, le personnel de l'Etat n'excède pas quelque milliers de personnes, alors que les fonctionnaires représentent 14% de la population active. Pour recruter ces personnes, l'Etat entre en concurrence avec d'autre employeurs potentiels (établissement public, entreprise privée) l’enjeu étant le niveau de compétence et la qualité du personnel. Cette concurrence est d'autant plus rude en période de plein emplois qu'en cas de fort chômage. Dans cette concurrence avec le secteur privée l'Etat possède un avantage essentiel: il peut offrir la sécurité de l'emploi "à vie" n'étant pas soumis aux lois du marché.  

 

L'Etat possède un patrimoine immobilier et mobilier, les recettes financières des administrations publiques pèsent un poids important dans l'ensemble des pays développés et celles-ci ne cessent d'augmenter. L'Etat assure aujourd'hui l'essentiel de ses ressources par des prélèvements obligatoires (impôts d'Etat, impôts locaux, cotisations sociales et taxes parafiscales).  

 

Dans un budget en forte expansion, toutes les dépenses de l'Etat ont augmenté en excès. Si l'on s'intéresse aux missions qu'il prend en charge, on distingue celles qui règlent les conflits et celles qui se matérialisent en octrois de prestations, d'ordre ou non matériel.

 

·      l'Etat, régulateur de conflits

 

Dans les rapports internationaux, l'Etat est le seul à pouvoir intervenir et engager juridiquement la société. Cela suppose la mise en place d'un ministère des Affaires étrangères et de services diplomatiques pour recueillir des informations, la négociation.. 

 

Un Etat se définit par sa capacité à monopoliser l'usage de la force au service des règles qu'il édicte. Il doit assurer la sécurité des citoyens : le droit, aujourd'hui, l'Etat moderne doit lutter contre l'insécurité en mettant en œuvre des politiques de prévention qui peuvent relever d'une dimension économique, sociale, éducative..  P.Braud poursuit ensuite son étude en évoquant la sécurité des rapports sociaux.

 

·      l'Etat dispensateur de biens

 

Jusqu'a la crise de 1929, les démocraties libérales attachaient au rôle de l'Etat "une double tache": assurer les investissements d'infrastructures (moyens de communication pour exemple), et garantir le respect des règles de l'économie de marché. Ainsi lorsque celle-ci se révèlent ébranlées par les séquelles de la "dépression mondiale", apparait la figure de "L'Etat Keynésien modernisateur" (Rosanvallon).Elle influencera de nombreux pays désireux de progrès économiques, notamment en période d'après guerre. C'est aussi la mise en place d'instruments de prévisions, ainsi est crée en 1946 l'INSEE, qui succède au service de "statistique générale". Il s'agit de mettre en place des indicateurs permettant aux pouvoirs publics et aux principaux acteurs économiques de développer en fonction du temps les réponses appropriées (lutte contre inflation...)

 

De plus, la protection sociale, mise en œuvre par l'Etat-Providence, concerne 4 catégories de situations: le chômage, la maladie/ le handicap, la vieillesse et la maternité. Le droit au travail et le droit de la santé publique ont connus une forte extension depuis le début du XXe siècle, posant un certain nombre d'interdictions, de contrôles d'ordres juridique ou technique.

 

P.Braud poursuit ensuite son essai sur l'Etat comme système décisionnel: l'Etat apparait comme une instance qui décide et qui tranche. Il s'agira d'étudier par la suite deux formes canoniques d'organisation étatique: l'Etat Unitaire et l'Etat fédéral.

 

·      Etat Unitaire

 

Il se définit par la prééminence d'un seul centre de pouvoir auquel toutes les autorités publiques se trouvent directement subordonnées, soit dans le cadre exclusif (Etat centralisé) ou bien dans le cadre mixte d'un contrôle hiérarchique (Etat décentralisé).

 

L'Etat unitaire décentralisé assure et garantit à tous les citoyens une loi identique sur l'ensemble du territoire par la centralisation du pouvoir en un seul échelon. L'autonomie des collectivités territoriales est très réduite et du point de vue juridique, il n'existe qu'une seule personne morale de droit public.

 

L’Etat unitaire décentralisé accorde certaines compétences et latitudes d'action aux collectivités territoriales, il conserve néanmoins un pouvoir de contrôle de la légalité et de l'opportunité des actes administratifs des collectivités territoriales (ex: France, Espagne, Italie).

 

 

 

       Il utilise, pour illustrer l'Etat unitaire l'exemple de la France puis celui de l'Allemagne pour l'Etat fédéral.

 

·       L'Etat fédéral

 

Il est composé de différent Etats fédéraux (Etats membres). Les Etats fédérés disposent en effet d'attributions administratives et juridictionnelles, et ont également leurs propres lois et constitution. 

 

P.Braud distingue par la suite les 4 étapes du processus décisionnel: tout L'initiative du processus décisionnel, la préparation des décisions, l'adoption des décisions et enfin l'exécution, le contrôle et l'évaluation.

 

             Dans les démocraties contemporaines, les études sur le "sommet de l'Etat" ont révélé que les gouvernements pouvaient être issus de catégories sociales assez étroites. Concernant les pays européens, on trouve au niveau parlementaire une nette prépondérance d'élus issus de classes moyennes et moyennes supérieurs (hommes de lois, enseignants, hommes d'affaires y sont particulièrement bien représentés). On y ajoute une forte présence de la fonction publique.

 

Il propose par la suite une observation de la représentation des salariés dans les secteurs publics, qui est de 37,5%. La classe politique n'est donc pas représentative dans le sens où elle constituerait "l'exacte microsome" de la société.

 

Analyses puraliste et néo-corporalistes

 

L’expression "milieu décisionnel central" (Catherine Gremion) invite à penser les dirigeants de l'Etat en interaction avec d'autres catégories de profession. Ils relèvent de trois sphères différentes: les responsables politiques, les hauts fonctionnaires puis les partenaires extérieurs.

 

Pour analyser les mécanismes d'interactions entre l'Etat et des partenaires extérieurs, deux parties se sont affirmés:

 

Le model pluraliste

 

Ici, la diversité prend une place prépondérante. Ces organisations professionnelles, syndicales ou associative sont indépendantes de l'Etat et sont peu ou pas soutenus financièrement par celui-ci.

 

Il est rare dans les démocraties pluralistes que les conflits ouverts ne comportent pas rapidement une dimension de négociation ouverte ou non, sujet à des décisions dont le contenu dépend en grande partie du rapport de force qui s'est construit. 

 

 

 

Le model néo-corporaliste

 

En effet, les relations entre l'Etats et les autres acteurs sociaux se manifestent souvent sous la forme d'une coopération étroite, ainsi des organismes de sécurité sociale (cnam), sont cogérés par des représentent du patronat et des syndicats  tandis que d'autres structures telles que la mutualité sociale agricole... Sont confiés aux représentants des professionnels.

 

Ainsi, ces phénomènes ont poussé des auteurs à proposer un concept de neo-corporalisme pour révéler de l'étroitesse des liens qui se nouent entre la puissance publique et diverse catégories sociales. Le corporatisme classique (Portugal et Italie pendant l'entre-deux-guerres) valorisait le poids des professionnels au détriment des politiques. Ce concept cherche à se focaliser sur les liens de mutuelle entre les acteurs publics et privés.

 

 

 

Philipe Braud conclue son essai sur une dernière problématique, "L'Etat a-t-il un avenir?" 

 

Il évoque en premier lieu la question de la gouvernabilité: la demande d'allègements ou de la suppression des réglementations publiques à été particulièrement présente dans l'Amérique reaganienne et l'Angleterre thatchérienne mais aussi dans les pays développées. Elle exprime la conviction que l'Etat paralyse la société par des interventions bureaucratiques et le perçoit incapable d'agir dans des conditions satisfaisantes.

 

P.Braud ajoute une autre interrogation, celle de l'aptitude de l'Etat à prendre des mesures adaptées aux réalités du terrain ou à concrétiser ses principes d'action. Ainsi, pour libérer l'Etat de ses obstacles, qui affectent la cohérence de ses actions, il est possible d'emprunter deux théories:

 

La première vise à son renforcement, soit les conceptions de la décentralisation ou de la déconcentration de manière à lui conférer une plus grande disponibilité pour traiter les questions essentielles.

 

La seconde direction (préconisée surtout aux Etats Unis et en Angleterre) consiste à "produire moins d'Etats". Cette solution implique la suppression de nombreuses instances de contrôles ou encore le retrait de toutes préoccupations d'interventions dans les domaines où l'initiative privée peut y supplée. De plus, cela implique une introduction, dans le système administratif, des logiques empruntées a l'économie de marché comme la facturation des prestations offertes ou le partenariat financier ou commerciale entre certaines administrations et leur client. 

 

          Apres avoir vu un Etat empêtré, il évoque un état délégitimité. Les sociétés sont moins facilement gouvernables si l'autorité du pouvoir politique se retrouve affaiblie, ainsi dans les régimes autoritaires, le phénomène se manifeste principalement par la diminution de la crainte des sanctions coercitives. Tandis que dans les pays de la démocratie pluraliste, cette même perte d'autorité résulte d'une crise de confiance des gouvernés dans leurs institutions.

 

En effet, gouverner exige d'imposer des contraintes, les démocraties contemporaines ont besoin de mobiliser des valeurs pour faciliter l'acceptation des mesures qui peuvent paraitre couteuses aux citoyens. La délégitimassions relative de l'Etat est aussi due à l'écroulement de la confiance en son efficacité. Par exemple, l'incapacité des pouvoirs publics à faire reculer le chômage, dans beaucoup de pays européens, à joué un rôle psychologique prédominant.

 

 

 

          Après avoir évoqué la question de la gouvernabilité (voir le  couleur), il s'intéresse aux modes de gouvernement concurrents.

 

L'Etat moderne se trouve de nos jours dans un réseau de contraintes extérieurs qui ne cesse de s'accroitre mais il lui faut également intégrer de nouvelles structures de pouvoir politiques. Il existe sur la scène internationale des configurations de pouvoirs institutionnalisées, aux grands moyens de pressions non négligeables, que l'on peut qualifier de système politique. On s'intéresse par la suite au cas de l'union Européenne, l'UE semble inaugurer un nouveau type de système politique différemment du fédéralisme classique. L'expérience de l'Union Européenne est "exemplaire" car elle concerne des Etats-Nations a longues traditions historiques, elle indique une direction que d'autres plus tard suivront sans doute.

 

 

 

Féminin Masculin

 

Michèle Ferrand
par Garance G.

 

INTRODUCTION

 

L’égalité entre les sexes est une question qui fait éternellement débat dans les sociétés contemporaines. Longtemps considéré comme un non sens ou même un blasphème, juger les femmes avec des critères identiques à ceux des hommes ne fait toujours pas consensus.

 

Bien des pistes sont étudies pour comprendre comment et pourquoi c’est installé la suprématie des hommes, explication métaphysique (imperfections morales des femmes), bio-naturaliste (les femmes plus faible physiquement), fonctionnaliste (grossesse et éducation d’un enfant considéré comme un handicap) ; aucune d’entre elles ne s’avèrent totalement convaincantes.

 

Il faut donc remonter un peu le temps pour comprendre, contrairement à ce qui nous semble une évidence l’opposition féminin/masculin ne remonte qu’à l’époque des lumières.

 

Auparavant dans l’occident chrétien, les hommes et les femmes n’étaient pas fondamentalement différents, les femmes étaient tous simplement « des mâles un peu moins parfaits ». Cette croyance ne s’explique que par « un défaut de chaleur vitale », l’appareil génitale des femmes était en effet considéré comme inférieure car copie inverse de celui des hommes puisqu’il est interne, les femmes n’avaient pas assez de puissance pour le faire sortir. Mais même la maternité du point de vue sociale était considérée comme inférieure a la paternité par le primat du sperme à l’origine du bébé. Dans les représentations d’Aristote, plus le père était puissant plus l’enfant avait de chances de lui ressembler. C’est au 18éme siècle que cette hiérarchisation quitte la dimension métaphysique pour s’inscrire dans celle de la nature. Le sexe biologique est alors défini comme une variable naturelle stable qui impose l’idée d’incommensurable différence des sexes. La vision de deux chairs opposes s’accompagne de la division sexuelle des espaces sociaux (privées publics) mais aussi des capacités et émotions.

 

Cette bi catégorisation est très forte dans les pratiques de notre société, pour le prouver il suffit de penser au gène qui nous saisit quand face a un individu on ne parvient pas à déterminer son appartenance sexuelle.

 

Devenir homme ou femme nécessite éducation, apprentissage et intronisation de son rôle sexué, c’est la fonction principale de la socialisation que d’inculquer à l’enfant les qualités socialement associes à son sexe anatomique. Dans nos sociétés se processus se fait par un double modelé, celui de la croyance en la différence naturelle des sexes et celui de l’aspiration à l’égalité hommes et femmes ; une contradiction surement à l’origine de la réalisation de l’égalité entre les sexes.

 

Au regard des progrès accomplis durant les 5 dernières décennies, le combat pour l’égalité juridique semble être gagné (droit de vote accordé aux femmes, suppression de la tutelle maritale, contraception moderne, droit à l’avortement). Si les femmes ont maintenu la capacité d’échapper à leur destin biologique et prétendre au même carrière que les hommes grâce a un appareil législatifs précis pour lutter contre les discriminations sexuelles ; un examen attentif montre la persistance des discriminations. Qu’ils s’agissent des salaires ou responsabilités professionnels, des mandats ou charges parentales ; « les femmes ne sont toujours pas des hommes comme les autres ».

 

1.TRAVAIL PROFESSIONNEL, TRAVAIL DOMESTIQUE.

 

« Le travail », ce terme ne couvre pas la même réalité et ne prends pas le même sens. En effet pour les anthropologues il signifie « taches ou activités » ; alors que pour les historiens et sociologues il s’agit d’une marchandise qui s’achète sur un marché. Cependant toutes les activités ne sont pas des marchandises, elles ne sont alors plus perçues comme du travail. C’est notamment le cas pour le travail domestique. Lors de la révolution française, l’ordre de la société appartient au domaine public quand la famille appartient au domaine privée. Cette séparation des deux sphères affecte les femmes à la sphère privée (la famille) et les hommes à la sphère public (le monde extérieure) ; c’est la division sexuelle des activités. Ce partage des taches est pensé en termes de complémentarité exclusive, accompagne d’une hiérarchisation (par exemple les taches associent à la procréation sont attribues systématiquement au femmes) ; les taches masculines sont alors plus valorisées que celle des femmes. On retrouve cette hiérarchisation dans nos sociétés contemporaines, elle s’exprime par la supériorité du travail productif marchand (domaine longtemps réservé au hommes) sur le travail productif et reproductif effectue sans rémunération (domaine longtemps réservé aux femmes). C’est pourquoi l’entrée des femmes dans le salariat au 19eme siècle bouleverse profondément le rapport entre les deux sexes. Si maintenant les femmes sont quasiment aussi nombreuses que les hommes dans le monde productif, elles ne sont pas pour autant arrêter d’effectuer leur tache de « maternité » et vivent sur le mode de cumul et non plus sur celui de l’alternance. Leur participation au monde de la production ne les libère pas de celui de la reproduction aboutissant sur une double journée.

 

1.Le travail productif : la part des femmes

 

Les femmes ont toujours travaillé ; seulement leur travail s’inscrivait dans celui du domaine domestique. C’est pourquoi la mise au travail des ouvrières a posé la question de la comptabilité féminine et de l’activité salariée. Les arguments étant qu’une femme ne puisse pas être entièrement dédié à son travail puisqu’elle était dans l’obligation d’abandonner tout travail si une exigence familiale la réclamait. Le modelé de l’homme au travail (stables, travailleurs, qualifiés) exigeant un salaire pour subvenir au besoin de sa famille s’oppose à celui de la femme (peu qualifies, peu investies, participation momentanée) dont le salaire couvre uniquement ses propres besoins. Cette opposition entre deux types de travailleurs ne permettait aucune concurrence et assurait une hiérarchie du travail par le sexe. Les entreprises et syndicat faisant apparaître des quantités distinctives préservait le risque de dévalorisation et conservée les femmes à des secteurs mineurs ; c’est la ségrégation naturelle de la main d’œuvre.

 

Lorsque le contexte l’exige, la main d’œuvre féminine est bien souvent requise, c’est le cas des périodes de guerres. Mais alors que l’on affirme que ces périodes ont permis une avancée vers l’égalité c’est le contraire qui est constaté. En effet notamment la grande guerre en France replace les femmes dans leur rôle de mères et d’épouses soumises pour rassurer l’identité masculine. La guerre ravive l’idée que les hommes sont faits pour combattre et les femmes pour enfanter. À la suite de cela la crise d’entre deux guerres voit le travail des femmes accuser de favoriser le chômage des femmes et sera alors diminuer voire supprimer dans certains pays européens. Le gouvernement de vichy quand a lui se voudra favorable a l’enfermement des femmes à leur seul impératif : la maternité.

 

Le modèle actuel de la travailleuse, c’est la fin de la femme au foyer. Alors qu’en 1968 plus de 60% des femmes de 20 à 59 ans vivant en couple était inactive elles sont moins de 30% dans cette situation en 1999. Aujourd’hui les femmes travaillent si le nombre d’enfants et leur statuts matrimoniales restent influant sur la vie professionnelle des épouses, l’activité d’une femme n’est plus questionnée. La nécessité d’un deuxième salaire est sollicitée comme réponse a cet accroissement même s’il est clair qu’il n’en n’a pas le seul enjeu. L’activité professionnel apparaît comme un élément fondateur de l’identité féminine et joue comme une ouverture sur la vie sociale et sur l’autonomie. Si ce rapport au travail les rapproche de plus en plus de celui des hommes, le maintien de disparités de traitement sur le marché du travail selon le sexe (inégalités des salaires, différences des types d’emplois…), appuie le fait que « travailler ne se décline pas de la même façon au masculin qu’au féminin. »

 

On observe sur le marché du travail un maintien des inégalités si l’amélioration des positions féminines est constatée elle n’est que relative ; les inégalités et les écarts entres hommes et femmes se maintiennent. En 1999 parmi les 31 catégories socio-professionnelle, les 6 plus féminisés (institutrices, santé du travail, personnel de service…) regroupent 60% des femmes actives occupées ; alors que les femmes représentent seulement 7% des catégories les plus masculines (ingénieurs, cadres, policiers…). En conclusion les femmes occupent des emploies moins qualifies que les hommes. Alors différence d’orientation scolaire entre filles et garçons ou conséquence de constructions de qualification ?

 

Un écart des salaires qui perdurent, si depuis 1980 il s’est réduit grâce a la meilleure formation des filles et la généralisation des emploies stables, la différence est toujours observable. En effet si les femmes sont en moyenne plus diplômées que les hommes, elles occupent moins souvent un emploi au niveau supérieur. Il demeure donc une part d’inexplicable, qu’on ne peut justifier, preuve de la discrimination.

 

Les possibilités de promotion et de carrières des hommes sont toujours plus rapides, notamment dans les professions peu mixtes. Entrée dans les mêmes emploies, avec le même bagage scolaire, hommes et femmes occupent en moins de 10 ans des positions différentes et hiérarchises par le sexe. Une raison à cela la maternité effective ou potentielle bien souvent considérer comme un frein. Les femmes sont suspectes de privilégier les taches familiales ou parentales au détriment de l’engagement professionnelle ; c’est en tout cas l’alibi avancer par les entreprises pour justifier le caractère prioritaire des hommes dans les postes promotionnels.

 

Il est déclaré impossible de traiter du travail sans tenir compte de ce qui se passe dans la vie privée. Faire carrière pour une femme exige une organisation très précise, grâce a des délégations multiples dont le conjoint ne fait pas forcement partie. En tout cas elle ne peut s’affranchir totalement du rôle de femme et de mère ; car elles portent porte en effet « la charge mentale ». Y compris dans les couples à double carrière ou la primauté de la carrière du marie est systématique.

 

La montée du chômage, la crise économique ont réactivé des réflexes de contestations et de défenses contre les prétendues « voleuses d’emplois » en effet ayant le libre choix de ne pas travailler, si elles font le choix de travailler les femmes suppriment alors des opportunités pour les hommes. Les statistiques sont claires les femmes sont plus souvent au chômages que les hommes, est pour cause le statut familial encore une fois influe différemment la probabilité d’être au chômage si l’on est un homme ou une femme ; ainsi le fait d’avoir des enfants est corrélé avec un taux de chômage plus élevé chez les femmes alors que l’on observe l’effet inverse pour les hommes. En définitive, cette augmentation continue du chômage féminin rend compte surtout de la volonté des femmes de rester sur le marché du travail.

 

2.Le travail domestique : la part des hommes

 

Les femmes sont maintenant majoritairement actives professionnellement mais cette nouvelle perceptive n’a pas bouleversé la division du travail. Le modelé de la famille « idéal » de la première partie du 20eme siècle, affectait à l’homme le rôle économique

 

et à la femme la gestion du quotidien. Si cette conception a évolué ; tout comme celle du travail domestique il demeure toujours l’apanage des épouses et des mères. En effet si depuis 1976, le nombre de couples à deux actifs dépasse le nombre de ceux ou seul l’homme est actif, des études menées par l’INSEE démontre que ce renversement n’a eu des conséquences ni matérielles ni symboliques sur le débat du travail domestique.

 

Cependant on ne peut nier que cette répartition à évolué entre 1986 et 1999, en effet l’engagement des hommes est plus fort d’autant plus que leurs conjointes sont actives. On constate une légère redistribution du travail ménager entre les conjoints, sans que le monopole de la femme dans la sphère domestique soit annulé. Cette évolution reste très différenciée socialement, les négociations conjugales ne se jouant pas de la même manière selon les positions professionnelles et le niveau de compétence des deux conjoints.

 

Le partage s’effectue également selon le type de tache et le milieu social des concernés. En effet lors des premières études , les statisticiens ont distingué trois types de taches : les taches féminines ( linge, couture,…) , les taches masculines ( porter le bois, le charbon , laver la voiture,…) et les taches intermédiaires ; c’est a dire négociable ( cuisine , vaisselle, mettre les couverts,…). Ce principe est maintenue au cours des années par des sortes de clichés , par exemple mettre une machine à laver le linge en route n’est pas plus pénible ( si n’est plus facile) qu’une machine à laver la vaisselle ; pourtant le nombre d’hommes le faisant reste extrêmement faible en raison de la connotation extrêmes féminine du linge. On remarque aussi que les milieux sociaux influent sur cette répartition des taches domestiques dans les ménages, en général les exploitants agricoles ainsi que l’ensemble des indépendants restent très traditionalistes s’opposant aux professions plus intellectuels qui forment l’avant garde progressistes.

 

L’évolution des mentalités vers des pratiques plus égalitaires, s’accompagne de la redistribution des attributs comme de la paternité par exemple cela modifiant les représentations des rôles parentaux. Pour autant les mères en font toujours plus.

 

Les pères consacrent en moyenne moins de 20 min par jour au soin de leurs enfants, quand une mère active leur consacre environ une heure. Concernant la garde des enfants en bas âge ou malade dans le réseau social et même dans l’institution cela est du ressort des femmes. Mais lorsque les hommes en général se consacrent à des taches domestiques ou parentales, ils ont tendance à choisir des domaines valorisant donnant ainsi priorité a leur désir plutôt qu’au nécessité.

 

Dans le quotidien, l’irruption des « nouveaux pères » n’a donc pas provoqué de révolution dans les foyers.

 

 

2. PÈRES ET MÈRES

 

Les représentations les plus traditionnelles de la différence des sexes se fondent sur la place occupée dans la procréation : le mâle féconde la femelle qui porte et accouche. Mais être pères ou mères peut prendre un sens spécifique dans chaque organisation sociale à une époque donnée et s’articuler différemment à la construction du féminin et du masculin. En France la définition actuelle de la parentalité, s’inscrit dans la continuité du code civil napoléonien (1804). Ainsi jusqu’au année 1960, le partage parental renvoyait clairement à des fonctions paternelles de l’ordre de l’économie et de l’autorité et des fonctions maternelles de l’ordre de l’affectif et du quotidien. Mais cet ordonnancement familial prôné par les fonctionnalistes va, au cours de la seconde moitié du 20éme siècle, être contredit par la réalité quotidienne.

 

Un nouveau régime démographique de la famille apparaît. Après le baby boom des années 1950, à partir de 1964, la natalité se met à baisser, le nombre de mariage à décliner, tandis qu’augmente la cohabitation de jeunes qui ne se marient plus ; la montée du divorce fragilise l’institution conjugale et les naissances hors mariages augmentent. Au début du troisième millénaire un premier enfant naît plus souvent hors mariage. Mais la signification sociale de l’illimité à profondément changé et à mis fin aux bâtards et aux filles mères abandonnées. Dans la première moitié du 20eme siècle la taille des familles est très variables, mais en 1950 le resserrement autour des fratries de deux enfants s’affirme et les familles nombreuses deviennent exceptionnelles. Les enfants sont donc moins nombreux dans chaque famille, mais le nombre de parents a au contraire augmenté. Sous l’influence conjointe notamment de l’esprit de mai 68 et des revendications féminines, les relations enfants sont profondément transformés. On fait un enfant moins pour assurer sa descendance que pour assurer son propre épanouissement et celui de son couple.

 

Cette évolution démographique s’accompagne d’un rééquilibrage juridique des positions parentales et conjugales. La loi du 4 juin 1970 est l’exemple parfait, elle remplace la puissance paternelle par l’autorité parentale, partagé donc entre le père et la mère. Égalisation donc dans la famille légitime, mais en cas de naissance hors mariage c’est la mère qui détient seule l’autorité. Cette inégalité des pouvoirs parentaux en faveur de la mère naturelle sera supprimée par les deux lois Malhuret de 1987 et 1993 qui redonnent ses droits au père naturel qui a reconnu l’enfant. Ses lois qui se succèdent prouvent une véritable recherche de l’équilibre entre maternité et paternité.

 

1.Décider de devenir parents

 

Le nouveau modèle parental en place, plus égalitaire et matière de droits et de devoirs parentaux repose aussi sur l’autorisation de la contraception médicalisée.

 

La capacité de contrôler la taille de sa famille, qui s’affirme dans la seconde moitié du 18eme siècle, s’appuie sur une technique essentiellement masculine. La diffusion de cette pratique dans toutes les couches sociales se traduit par la chute régulière e la fécondité tout au long du 19eme siècle. À la même époque se développe l’idée que la force d’un pays réside dans sa population, or la France n’occupe que la cinquième place en Europe ; il faut d’avantage d’enfants en France. Si l’avortement et l’abandon sont particulièrement stigmatisés, les pratiques contraceptives sont également dénoncées. Après l’hécatombe de la guerre 14-18, dans l’optique de repeupler la France, la loi de 1920 interdit et réprime l’ensemble des techniques visant à éviter une naissance, seul reste autorisé le préservatif pour lutter contre des maladies. La grossesse interrompue, qui reste encore « l’affaire des femmes », se limite au seul choix de l’avortement clandestin, couteux et dangereux. La répression de l’avortement continuera et atteindra son maximum sous vichy, ou mal maternité est alors présenté comme un devoir civique ; les femmes sont alors réquisitionnées pour procréer.

 

Le baby-boom de l’après guerre fait passer au second plan la question de contrôle des naissances. La découverte de la pilule contraceptive dans les années 1950 va encourager les courants favorables au contrôle des naissances. Entre 1965 et 1975, la question de la libéralisation des pratiques contraceptives et abortives va être débattue. La contraception moderne médicalisée (pilule et stérilet) s’est banalisée pour les femmes nées dans les années 1960. Toutefois cette amélioration n’a pas pour autant entrainé la diminution du recours à l’avortement ; désir d’enfants, aléas de la vie affective, conditions matérielles étant des féroces adversaires. Cependant le passage de la maternité subie à la maternité volontaire et contrôlée représente un véritable saut pour la construction identitaire féminine.

 

Le temps représente pour les femmes une véritable contrainte, le temps de l’enfantement étant compté. Le « bon-âge » pour faire un enfant est celui ou démarre où se conforte une carrière, ce qui explique que la naissance du premier enfant est d’autant plus retardée que le niveau de formation des mères est élevé. C’est donc un double projet que développent les femmes, ou elles doivent concilier deux logiques, nécessité dont les hommes sont exempts.

 

Planifier leur descendance implique pour les femmes de mettre en balance deux types d’identité celle de mère et celle de femme professionnellement active. Toutefois, le refus ou le désir d’enfant passe aujourd’hui nécessairement par la volonté féminine. Une compagne peut en effet refuser d’être mère (en avortant par exemple) ou décider de procréer sans en avertir le géniteur. Cette dépossession des pères a été souligné comme conséquence du féminisme et de la « prise de pouvoir des mères) que représente la liberté de procréation.

 

2.La charge des enfants

 

La forte asymétrie selon le sexe dans le partage des taches domestiques explique la division des taches éducatives. En général, ce qui relève de la maintenance et du soutien scolaire est plutôt situé du coté maternel, tandis que ce qui relevé du normatif et du ludique est plutôt investi par le père. Mais ce partage dépend également des ressources détenues par les deux parents (scolaires, professionnels, culturels …). Ainsi le champ de la définition de la paternité s’élargit au fur et à mesure que le niveau scolaire des parents s’élève et que l’activité professionnelle de la mère se rapproche de celle du père.

 

La parentalité après la séparation. Le nombre annuel de divorce augmente de façon régulière à partir de 1963, 30% des couples formés en 1990 sont séparés dix ans plus tard. La séparation est plus souvent à l’initiative de la femme mais elle intervient de façon inégale selon les milieux sociaux.

 

Après le divorce, de façon très stable, environ85% des enfants sont confies à la mère.  La pratique qui commence à se développer de la garde alternée ne se développe souvent que dans les catégories moyennes supérieures. Le plus souvent, la règle de l’intérêt de l’enfant se traduit par la fixation de sa résidence chez sa mère, le père apparaît alors comme le maillon faible de la chaine familial. Au delà de l’appauvrissement financier éventuel, le divorce ou la séparation entrainent souvent des conditions de vie affectives et relationnelles plus difficiles pour les femmes. Alors si les femmes peuvent davantage affirmer leur indépendance, grâce a leur emploi, elles n’ont pas toujours pour autant les moyens de se séparer sans payer un prix élevé. Pour certaines cela signifie entrer dans le cercle de la pauvreté.

 

3.Le registre symbolique

 

À l’inverse de la maternité, attesté par la grossesse et l’accouchement, la paternité est longtemps restée « incertaine ». Cette opposition traditionnellement établie, entre une maternité essentiellement biologique et une paternité sociale, a été d’abord remise en cause par le féminisme contemporain puis par la revendication des pères, pour finalement éclater avec l’apparition de l’aide médicale à la procréation.

 

Mère esclave ou mère toute puissante ? La gestation, l’accouchement, l’allaitement et l’élevage des enfants ; toute cette mobilisation des femmes se feraient au détriments de leurs autres activités sociales et expliqueraient leur relégation et leur peu de pouvoir. Mais la manière de faire balance entre maternité et féminité ne fais pas même consensus à l’intérieur même du mouvement des femmes Au courant féministe radical, mettant l’accent sur l’esclavage social de la maternité s’oppose un autre courant qui fait l’apologie de la maternité flamboyante. Ces deux tendances perdurent, dans une opposition, ou la première refuse de prendre en compte les bénéfices affectifs et sociaux que procure la maternité et la seconde oublie un peu rapidement la lourdeur des taches matérielles qu’elle introduit.

 

Toujours sous l’influence de mai 1968, le « bon parents » apparaît comme celui qui, loin de représenter l’autorité et la règle, s’implique affectivement dans la relation parentale. C’est dans ce cadre qu’il faut analyser le développement de pratiques masculines qui ressemblent de plus en plus a celle de la mère. Mais il existe toujours un décalage à la fois dans le degré d’implication et dans le type d’intervention de la part des pères.

 

Les nouveaux modes de procréation, moteur de l’éclatement de la notion de maternité et paternité. Dans la mesure ou l’enfant apparait comme une marque essentielle de l’identité sexuée et sociale, les individus stériles sont confrontés à une double souffrance : celle de ne pas avoir d’enfant et celle d’un corps qui fonctionne mal. Les interventions médicales, peu nombreuses sur l’homme sont en revanche, fort diversifiées sur les femmes. Cependant elle doit subir des traitements lourds, contraignants et couteux alors qu’elle pourrait avoir un enfant sans problème avec un autre partenaire. Ces pratiques qui se généralisent en dépit de leur faible succès prouvent l’importance attaché à la filiation biologique.

 

Cette aide médicale à la procréation (AMP) induit un nouveau contexte de l’attribution de la parenté, elle réaffirme la non symétrie entre les sexes. Tandis que les tests génétiques sortent définitivement la paternité de son incertitude, en apportant la preuve incontestable de « qui est le père », le don d’ovule ou encore la maternité de substitution déplacent la définition de maternité, la mère n’est plus systématiquement celle qui accouche. La question posée par les AMP est en fait celle de l’appropriation de l’enfant, ou s’opposent arguments biologiques, juridiques et sociaux.

 

Fragilité des couples, monoparentalité, homoparentalité, parents adoptifs célibataires, AMP, autant de facteurs qui bouleversent fortement ce qui apparait pour beaucoup comme le noyau fondamental de la définition du masculin et du féminin autour de la parentalité.

 

 

3. LA SOCIALISATION SELON LE SEXE

 

À la naissance, un enfant est systématiquement assigné à l’un des deux sexes à partir du constat de son anatomie externe et, sauf rares exceptions, cette assignation es constante. Mais cet étiquetage de sexe est sans cesse réactivé tout au long du processus de socialisation qui réitère les modalités de la division sexuelle du travail spécifique à chaque société.

 

1.Famille et groupe de pairs

 

Les stéréotypes sexués issues de la famille. Dès le premier âge, les parents accordent une attention différente à leur enfant selon son sexe. Les garçons sont toujours plus stimulés que les filles, qui sont encore aujourd’hui, davantage contrôlée. Plus important on remarque l’idée que les garçons peuvent faire les frais de stéréotypes sexués, les parents font preuves d’homophobie tout autant sinon plus que de misogynie. Ainsi les parents s‘inquiètent davantage devant un petit garçon qui s’engage dans un jeu réputé féminin qu’envers une fille qui fait de même dans un jeu masculin : une fille « garçon manqué » est moins stigmatisée que le garçon qui se comporte en fille tant est forte la crainte que cela débouche sur une éventuelle homosexualité.

 

La différence des sexes ne se laisse pas facilement oublier dans les stratégies éducatives. Les ambiguïtés et les contradictions de la pédagogie familiale maintiennent un double système de socialisation. Du semblable car on y pousse le plus loin possible les efforts de dotation égalitaire mais en même temps la famille veille à maintenir une différenciation subtile des comportements masculin et féminin. Ce caractère sexué de l’éducation s’accentue à la puberté plus ou moins intensément selon les domaines et le milieu social. Les parents espèrent d’abord pour leur fils la réussite sociale (professionnel et monétaire), alors qu’ils sont trois fois plus nombreux à donner la priorité pour leur fille, au bonheur domestique.

 

Le degré d’autonomie laissé aux adolescents est un bon indicateur du maintien d’une différenciation sexuée dans l ‘éducation. Même si les parents se montrent de plus en plus « compréhensifs », les filles sont toujours plus surveillées que les garçons dans leur sortie et leur fréquentation. Les garçons sont également contrairement à leur sœur plus facilement dispenses des taches domestiques car leur temps et leur espace concernent plus précocement d’autre univers que celui de la famille. L’enfant pour construire sont identité sexuée ne retient qu’une part de son héritage éducatif explicite. Cependant il ou elle ne pourra pas s’affranchir si facilement des normes et des habitudes intériorisées inconsciemment, d’où l’importance d’une bonne éducation.

 

Il existe aussi d’autre milieux de socialisation dont « le groupe des pairs ». Les relations avec les autres enfants participent activement à la construction de l’identité sexuée et a la manière de se comporter avec l’autre sexe. Une culture spécifique se développe selon les sexes : dans les groupes de garçons, les problèmes de pouvoir sont importants, les activités plus hiérarchises ; et ils ont soient recours au ordres menaces, vantardises et se coupent souvent la parole. Dans les groupes de filles, la parole remplit une fonction sociale plus constructives, la collaboration l’emporte sur la hiérarchisation.

 

Ce n’est que plus tard que la relation entre les sexes devient asymétrique. Dés qu’approche l’âge de la puberté, les filles commencent à manifester une moindre estime d’elle mêmes. Néanmoins des études récentes montrent que les filles adolescentes se différentes des garçons, certes, mais elles s’attribuent collectivement des qualités féminines spécifiques. Leur prise de conscience renvoie les garçons à leur spécificité et les filles au leurs.

 

2.L’école

 

Longtemps exclue du système éducatif, les filles sont à partir de 1971, plus nombreuses à rentrer à l’université. Ce rattrapage s’est effectué de façon si rapide et prends une telle ampleur qu’elle est maintenant considère comme un fait majeur de société. Mais on ne peut oublier pour autant le dur chemin que les filles sont du accomplir pour obtenir le droit de s’asseoir à l’école à coté des garçons et y recevoir le même enseignement.

 

Pendant des siècles, instruire les femmes a été jugé inutile. Jusqu’au 17eme l’apprentissage était essentiellement religieux. Le siècle des lumières va reposer la question, mais certains philosophes tel que rousseau cherchent à faire triompher sa conception réductrice de l’éducation féminine : ne pas encombrer le cerveau des femmes pour ne pas les détourner de leur vraies devoir (mariage et maternité). Au 19eme siècle, si l’on accorde davantage d’intérêt a l’instruction féminine, c’est dans l’objectif de faire de bonnes épouses et de bonnes éducatrices. Cette finalité explique le retard de l’instruction des filles, de plus il demeure toujours la crainte de voir l’instruction féminine bousculer l’ordre familial et social. Mais la création de lycée jeunes filles contribue à légitimer une nouvelle image de la femme, la femme instruite, cultivée et indépendante économiquement. La séparation des établissements pour chacun des sexes restant cependant une règle faisant obstacle à l’équité face à l’éducation.

 

Le nombre croissant des filles voulant présenter le baccalauréat va conduire au décret Bérard en 1924, permettant au filles d’avoir accès au mêmes enseignements que les garçons. Juste avant 1939, les filles ont donc amorcé un réel rattrapage ; mais la seconde guerre mondiale et surtout le régime de vichy vont entrainer une régression. L’éloge de l’ignorance de la femme est une idée forte du régime de vichy qui nie les avancées scolaires et professionnelles des femmes. Cette vision biologique, soutenant que l’intelligence est différencié d’abord selon le sexe, marquera durablement les esprits mais n’aura finalement guère d’incidence sur la progression de la scolarisation féminine.

 

En 1950, seules les écoles maternelles  et quelques écoles primaires sont mixtes, le principe de séparation des sexes reste la norme. Pourtour en quelques années la mixité va s’imposer comme solution aux problèmes de pénurie de locaux et d’enseignants. Elle devient le régime général des collège d’enseignement secondaire, général et technique depuis 1966. La loi Haby en 1975, établira définitivement la règle de l’accès aux filles et garçons des mémo établissements.

 

L’école est mixte, mais les filles et les garçons ne se retrouvent pas systématiquement cote à cote. Ainsi les filles osant plus présentes dans les filières générales que dans l’enseignement professionnel et les filières techniques. À l’intérieur de la filière général, se construit une ségrégation sexuée qui est toujours hiérarchises en faveur du masculin. Les sections scientifiques sont toujours considérées comme les plus prestigieuses, ou certes la série c’est féminisé depuis 1960 mais les filles y restent largement minoritaires. En effet la filière mathématique est souvent considéré comme inévitable pour un bon élevé garçon, quand elle l’est beaucoup moins pour une bonne élève fille.

 

Grâce à la mixité, les différences de réussite scolaire s’affiche clairement : les filles sont plus performantes et cette supériorité se manifeste des les premiers apprentissages. Quel que soit l’âge, les filles sont plus scolarisées que les garçons, et cette meilleure réussite scolaire se constate dans toutes les catégories sociales. Cette réussite des filles est souvent présentée comme paradoxale, car elle ne bouleverse pas la hiérarchisation homme-femme, « elle reste respectueuse de la division sexuelle du travail ». Ce que confirment les orientations post-bac, ou en dépit de l’entrée massive des filles dans les filières supérieures et d’une réduction des écarts avec les hommes, les orientations par domaines n’ont peu voire pas changé en l’espace de 30 ans.

 

Ces différents points de vue on en commun le fait d’articuler l’analyse des inégalités scolaires selon les sexes et les inégalités entre classes sociales. Sont ainsi interrogés les relations entre l’école, la famille et le marché du travail. On constate également en portant une attention particulière sur l’héritage familiale que certaines familles sont véritablement en « avance sur l’école ». Dans la filière d’excellence que représentent dans la France aujourd’hui, les classes préparatoires aux grandes écoles, il y a 1 fille pour 5 garçons.

 

Même si elles restent minoritaires, elles y sont significativement plus nombreuses qu’il y a 25ans. Cette évolution certes lente et encore limitée, fait espérer qu’a terme la réussite scolaire des filles pourra participera l’atténuation de la domination masculine.

 

4. LA PLACE DES FEMMES DANS L’ESPACE PUBLIC

 

1.Stratification et mobilité : où sont les femmes

 

Chaque individu est doté d’un statut social, qui dépend à la fois de critères sur lequel il ne peut agir (sexe, Age, origine) et de critères sur lequel il peut agir (diplômes, cultures,). En France, les sociologues s’appuient, pour distinguer les groupes sociaux, sur la construction statistique élaborée à partir d’une analyse synthétique des positions professionnelles. Un tel « classement » ne prend pas en compte les individués n’exerçant pas d’actives professionnelle, notamment les femmes mariées ou vivant en couple qui restent au foyer. Elles étaient alors définies par la position sociale de leur conjoint. Les statisticiens français ont classé également les femmes actives professionnellement dans la catégorie du chef de ménage, ce qui rend invisible la position de la femme dès qu’elle ne vit pas seule. La femme est donc classée en fonction de son activité professionnelle quand elle vit sans conjoint, et en fonction de celle de son conjoint quand elle se met en couple. Cette technique statistique, réduit l’articulation de la position de famille avec les structures de classe à la seule place de leur membres masculin.

 

Dans une démarche logique, il faudrait comparer la position des femmes à celle de leur mère. Or les donnes disponibles permettent de comparer les femmes actives à leur mère, seulement si ces dernières o t été actives, ce qui étaient relativement are dans la génération précédente. Pour les hommes, les cursus professionnels des pères et des fils restent comparables dans les grandes lignes. De plus chez les femmes les possibilités de cursus sont nettement plus varies, avec des arrêts plus ou moins longs, plus ou moins nombreux, lies surtout à leur charge familiale. D’autant qu’il s’agit d’étudier des générations de femmes qui n’ont pas entretenu le même rapport au travail ; aujourd’hui les femmes pensent l’activité et la maternité sur le mode du cumul alors que leur mère les envisageait sur le mode de l’alternance. Donc en venant occuper massivement les professions d’employés, les femmes ont contribué à permettre à leurs frères et maries d’occuper plus souvent une position sociale plus élevé que celle de leur père. En définitive, le développement de l’emploi féminin, fait majeur pour l’étude de la mobilité au féminin, est aussi un fait de structure qui joue en retour sur les formes de la mobilité sociale des hommes.

 

2.Création et sociabilité

 

L’identification des femmes à leur fonction reproductive s’accompagne d’une définition restreinte à leur capacité créative. L’argument du nombre est souvent avancé : les femmes célèbres ne peuvent être qu’une exception. Pourtant, l’histoire récente montre une participation des femmes à la vie culturelle sans précèdent. L’essor des scolarités féminines, l’évolution des techniques, l’augmentation d’un oubli amateur et les nouvelles structures de la production culturelles sont autant de facteur qui vont se conjuguer pour permettre aux femmes de conquérir plus d’autonomie et plus de visibilité sociale. Plus généralement, l’analyse de la place des femmes dans le champ artistique semble particulièrement apte à éclairer la duplicité des pratiques et des discours sociaux à la fois égalitaires et discriminatoires. En dépit de certaines avances sur le champ littéraire, les femmes restent très minoritaires dans les domaines artistiques, dont elles sont pourtant les principales consommatrices.

 

L’affectation préférentielles des hommes a la sphère publique et des femmes a la sphère privée colore différemment les pratiques de sociabilité. Les hommes font surtout preuve d’une sociabilité « externe », souvent induite par leur activité professionnelle, la pratique syndicat et la participation a centaine types d’association (sport,). Au contraire les femmes mettent en œuvre une socialisation plus « interne », centrée sur le réseau familial, limitée par le voisinage.

 

3.La parité en politique

 

Les femmes se voyaient refuser le droit de participer à l’universel en raison de leur nature. Car leur seul moyen de justifier leur exclusion de la vie politique, c’est de les considérer comme naturellement différente des hommes. Cet argument se maintiendra tout au long du 19eme et 20eme siècle. En effet le siècle qui sépare en France, le droit aux suffrages universel des hommes (1848) de celui des femmes (1944) étonne. Les française, en effet, ont été reconnues comme citoyennes à part entière beaucoup plus tardivement que dans bien des pays à l’héritage démocratique incertain ou à la sensibilité féministe improbable.

 

Devenue électrices, les femmes ne sont guerres élues. Alors que toutes les élections au scrutin proportionnel sont favorables aux femmes ainsi qu’au jeunes ; la véritable rasions de l’absence des femmes en politiques tient en la misogynie des parties politiques. Les femmes par définition sont exclues d’une certaine « culture masculine » ; elles n’ont pas bénéficié de l’apprentissage leur permettant de « tenir une salle » ou un meeting, leur socialisation a été principalement tourné vers l’intime et le privé et non vers le public. Par ailleurs le militantisme potiquet représente en terme de budget temps, à une troisième journée. Les horaires familiaux sont peu compatibles avec ceux des réunions ou les décisions les plus importantes sont prises. Si un homme politique peut compter sur sa femme, la réciproque n’est que très exceptionnellement vrai.

 

Même si le consensus se fait chez l’ensemble des féministes sur la nécessité de remédiera l’exclusion des femmes en politique, la question de la parité réactive les clivages entre la tendance « universaliste » et la tendance « différencialiste ». Les universalistes redoutent les effets pervers delà revendication d’une place pour les femmes, en raison de leur spécificité féminine. Elles y voient une régression dans le mouvement d’égalisation de la société. Les paritarismes reprennent l’argumentaire, dans lequel les femmes sont différentes et complémentaires des hommes, « il y a deux sexes » qui doivent être également mais séparément représentés. Différentialistes et universalistes se médié pareillement de la nature féminine dont s’est nourrie la domination masculine. Il s’agit de réclamer une plus juste place des femmes au nom d’une exclusion, en tentant de construire un universel véritablement mixte.

 

Les politiques et les juristes adoptent la même position que les féministes universalistes. Le partage du corps social en deux catégories Mance les principes fondateurs de la démocratie française, qui ne connaît que le « citoyen » c’est à dire un individué abstrait, dépourvut de tout attribut particulier. Cependant l’opinion partage cette vision pragmatique de « l’évidence de la différence » et les sondages montrent qu’elle est de plus en plus favorables à une meilleure représentation des femmes dans les responsabilités politiques. Les ministres femmes sont apprécies car on leur prête volontiers des qualités différentes de celles de leur homologue masculin : plus proches des gens, elles les écouteraient mieux. Mais symboliquement, pour une partie de la population, y compris féminine, la politique reste une affaire d’hommes.

 

4. Le dernier baston : le pouvoir économique et institutionnel

 

Le domaine qui semble résister le plus à l’égalisation des positions selon le sexe est celui du pouvoir : pouvoir politique mais aussi économique et institutionnel. Malgré leur succès à l’école, les femmes restent non seulement cantonnées à certaine profession, mais aussi aux segments dominés de chaque filière. Qu’il s’agisse du secteur privé ou du secteur public, elles accèdent beaucoup plus difficilement que les hommes et en nombre plus réduit aux positions les plus visibles et les plus rémunères. En effet parmi les facteurs de la féminisation des catégories supérieurs, le diplôme joue un rôle déterminant. Cependant s’il permet aux femmes de se présenter à certains concours de recrutement, il ne garantit nullement les promotions ultérieures. L’accès aux cercles les plus élevés se fait sur un principe de cooptation qui peut expliquer que les femmes puissent se voir peu à peu écartes des postes les plus cotés.

 

Certaines fonctions dirigeantes ont été depuis longtemps accordés aux femmes, dans la mesure ou leur autorité s’adressait à des individués de mémés sexes qu’elles : directrices de congrégation, d’établissements scolaires féminins, … Mais à partir du moment ou elles sont admises à l’université, et ou elles peuvent prétendre aux concours administratifs, les candidatures féminines sont assez mal reçues. L’argument essentiel est qu’il est impossible pour une femme d’avoir de l’autorité sur un homme, en raison de son inaptitude au commandement, car elle n’a pas bénéficié de la formation du service militaire.

 

La création, le monde de la politique professionnelle, de l’industrie et de la haute fonction restent des domaines ou les femmes sont des difficultés à se faire une place. C’est moins l’absence de compétence professionnelle des femmes qui les handicape dans leur promotion, mais plutôt l’intériorisation par les hommes comme par les femmes, du caractère sexué de certaines qualités.

 

5. AMOUR, SEXUALITÉ ET DOMINATION MASCULINE

 

Dans nos sociétés la sexualité révèle de l’intime et du privé qui sont, dans le sens commun, opposés au social, au public. Pourtant la sexualité est en même temps utilisé pour justifier la place différente des hommes et des femmes dans la société. La sexualité humaine se distingue de la sexualité animale car la sexualité humaine s’apprend et les comportements sexuels sont encadres par des règles, des interdits moraux ou légaux qui prennent des formes variables selon les sociétés et les époques.

 

La sexualité n’a guère été étudié par les sciences humaines et sociales. Les travaux sur les comportements sexuels en France sont donc récents. Les recherches se sont développées en raison de l’irruption du sida, la lutte contre cette maladie sexuellement transmissible nécessitant une meilleure compréhension de ce qui se joue dans la sexualité. Cette rareté des travaux sur l’amour et le sexe, s’explique par la difficulté d’en traiter sociologiquement, alors même que les sentiments amoureux et les comportements sexuels jouent dans le maintient, la transformation ou l’évolution des rapports entre hommes et les femmes, un rôle déterminant.

 

1.Vers plus d’égalité : la fin de la double morale

 

Il y a encore quelques décennies, l’entrée en sexualité des jeunes filles restaient étroitement lié au mariage. Quand les garçons été autorisés à une plus grade précocité, les premiers rapports sexuels étant considérés comme appartenant à une phase autonome du passage à l’Age adulte. Cette autonomie est aujourd’hui accordée aux jeunes filles qui s’en saisissent plus tôt. Contrairement à ce que nous font croire les médias, l’âge moyen au premier rapport sexuel, qu’il s’agisse des filles ou des garçons n’a pratiquement pas bougé. Ce qui change véritablement, c’est la disparition des rapports tardif chez la femme. C’est incontestablement l’arrivé des contraceptions féminines qui a permis le rapprochement des comportements ; en permettant la dissociation entre sexualité et procréation.

 

Mais derrière cette réduction des écarts, se maintiennent certaine différence qui soulignent que certains actes ou certaines attitudes ne prennent pas la même signification pour les hommes et pour les femmes. Deux exemples vont éclairer cette différenciation : « la première fois » et les qualités recherchés chez le partenaire.

 

Quelle que soit la génération à laquelle elle appartiennent, deux femmes sur trois déclarent qu’elles étaient très amoureuses de l’homme qui les a initiées, contre un tiers seulement des hommes qui déclarent être dans ce cas. Cette opposition souligne la très forte différence des attentes des jeunes gens et des jeunes filles en matière de vie sexuelle et affective. Pour les garçons, la première expérience prend essentiellement l’allure d’une étape dans l’apprentissage de la sexualité. Les filles à l’inverse sont beaucoup plus nombreuses à associer la sexualité à l’amour voire au couple. On peut ainsi distinguer deux modes d’organisation de la vie sexuelle débutante : celle plutôt féminine de relations amoureuses prolongées qui aboutiront à la ^première expérience sexuelle et celle, plutôt masculine, de relations plus brèves, plus immédiatement sexualisées.

 

La procédure du repérage, de la séduction et du « choix » du partenaire ne se construit pas de la même façon au masculin ou au féminin. Etre séduit par son partenaire signifie qu’il possède, au yeux de l’épris, un certain nombre de caractéristiques qui permettent de porter sur lui un jugement si favorable qu’il amène à le préférer à tout autre. Or les jugements amoureux se construisent à partir des catégories intériorisées qui diffèrent selon le milieu d’origine notamment pour les qualités décrétées « féminines » ou « masculines ». Les femmes s’intéressent à l’apparence des hommes, mais attachent tout autant sinon plus d’importance aux qualités sociales : niveau culturel, profession, postions… Les hommes valorisent davantage les qualités physiques féminines ainsi que les qualités relationnelles et affectives.

 

Le choix du conjoint, hier encore opéré par les familles, est revendique aujourd’hui comme révélant uniquement des préférences et des désirs des partenaires. Même en toute liberté, on n’épouse pas n’importe qui : on donne la préférence à son semblable social. Ce qu’on appelle l’homogamie. On continue à trouver sa moitié dans son milieu d’origine ou tout près. Quand on examine la répartition des individus vivant en couple ; l’écart même minime, de position sociale en faveur de l’homme interroge le rôle des choix amoureux dans la reproduction de la domination masculine. Cette « participation » notamment féminine, à un fonctionnement social qui reproduit la hiérarchisation des sexes, est à l’œuvre dans les critères de sélection de certaines caractéristiques encore plus objectivables que le statut social : l’âge et la taille. En effet l’écart d’âge en faveur de l’homme reste la règle. Concernant la taille, les hommes ne sont pas opposés à prendre pour compagne une femme plus grande, alors que les femmes, dans un bel ensemble, refusent d’avoir un conjoint plus petit. Il semble d’ailleurs que ce refus est moins motivé par les normes esthétiques que par l’incorporation de la hiérarchie homme-femme. Tout laisse penser qu’une des inquiétudes de la femme est que l’homme soit ou se sentent diminuer.

 

2.Les transformations de la sexualité conjugale.

 

Pendant des siècles, et aujourd’hui encore dans un bon nombre de société, amour et mariage ne vont pas systématiquement de pair. Ce n’est que récemment un sicle environ et dans seulement les sociétés orientales que le mariage d’amour s’est peu à peu affirmé comme norme. Dans cette configuration ou le couple se choisit les enfants représentent la consécration de leur amour, et la sexualité amoureuse s’accorde avec la sexualité reproductrice. Au delà du plaisir sexuel, il semble cependant qu’hommes et femmes n’attendent toujours pas la même chose de la sexualité. Les hommes y cherchent davantage une forme de la assurance virile, les femmes, la confirmation de la qualité de la relation ; cette différence dans les attentes résulte de la socialisation primaire.

 

Les enquêtes qualitatives montrent que le désir masculin et le désir féminin n’ont pas le même poids ni la même légitimité dans la vie sexuelle d’un couple. Même si les femmes prennent plus souvent l’initiative qu’il y a 20ans, elles semblent toujours accordées plus d’importance au plaisir de leur partenaire qu’au leur.

 

L’homosexualité, même minoritaire, apparaît comme susceptible d’éclairer ce qui se joue dans les inégalités l’œuvre dans les relations sexuelles. Même si l’on constate à partir du 20eme siècle une plus grande tolérance de la société vis à vis des homosexuels, leur perception sociale reste largement codifiée par la dualité hiérarchique des genres. L’homosexuel « viril », la lesbienne « féminine » sont moins stigmatisés que la partenaire masculin « passif » et efféminé, ou la partenaire « active » au allure masculine. La préférence « féminine » pour le relationnel et « masculine » pour le sexuel semble se confirmer suite à leur étude. Si au début du 21eme siècle, une grande partie de l’opinion public commence à accepter l’idée que les couples homosexuels sont des couples comme les autres. Pour autant l’homophobie perdure sous des formes différentes, la stigmatisation De l ‘homosexualité reste forte dans certains milieux sociaux et à certains âges.

 

3.Viols et violences sexuelles

 

Dans la plupart des sociétés, selon des modalités et une intensité variable, les hommes ont souvent imposé leur sexualité aux femmes par la violence, qu’il s’agisse de violence individuelle ou collective, qu’elle se manifeste dans la sphère publique ou privé, en temps de paix comme en temps de guerre. Ce qui caractérise le viol, c’est d’être exclusivement le fait d’un homme, qui prend pour cible femmes ou enfants, voire d’autres hommes, mais toujours dans un rapport de domination. Le viol met à jour, en poussant à la limite, la logique du sexisme dominant qui fait de la femme ou d’un être « inférieur », un sexe à prendre. Mais dans l’usage de la violence, les armes utilisées par les violeurs sont souvent plus perverses que la force brutale :la dépendance économique, l’amour, le chantage affectif, la peur. C’est dans cette perspective qu’il faut analyser les violences conjugales et les abus sexuels dans le cadre familial. Depuis quelques années, la définition de violence sexuelle s’affine pour aboutir en 1992, en complément des lois sur les violences familiales et conjugales, au vote d’une loi contre le harcèlement sexuel. Ce dernier est considéré comme une violence sexuelle, qui se manifeste essentiellement par des gestes, des attitudes, des paroles, dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle. Dans la mesure ou la sexualité reste très liée pour les femmes à l’amour, l’affectif, au familial, la manière dont elle participe à la reproduction de la domination masculine est complexe est difficile à analyser. La revendication égalitaire provoque la mise en question des identités de sexe qui reste en jeu dans la définition des territoires, des pratiques et des rôles corporels sexués.

 

CONCLUSION

 

Les « arrangements » entre les sexes, aujourd’hui sont totalement différents de ceux en vigueur un siècle auparavant. L’accort entre les positions masculines et féminines s’est fortement réduit. Les femmes ont acquis la capacité de décider de leur vie, individuellement et socialement. Mais le maintient têtue de certaines discriminations sexuées montrent que si la domination masculine semble s’être atténuée, elle n’a pas disparu. Cependant l’analyse de situations et biographies féminines permet aussi de mettre à jour l’existence d’inégalités intra sexes, à travers la répétition différenciée des progrès des positions de femmes selon leur classe sociale. Malgré un rapprochement des comportements induit par la massification de l’éducation et le développement de la société de consommation, filles et garçons ne sont pas élevés selon les mêmes règles ni les mêmes attentes. La réorganisation d’un certain nombre d’attributs et de valeurs associés au « masculin » et au « féminin » s’est effectué tout au long du 20eme siècle grâce aux évènements de 1968 et au féminisme. L’essor des scolarités des filles et leur meilleure réussite ont provoqué à la fois une naissance d’un certain ressentiment de leur homologue masculin moins brillants, et un clivage plus net entre celles qui réussissaient et celles qui abandonnaient leurs études. Le rapprochement des positions des hommes et des femmes dans certains milieux sociaux apparaît comme une véritable avancée, mais ne doit pas dissimuler les difficultés rencontrées par de nombreuses femmes dans la reconnaissance de leurs droits plus élémentaires réduction des inégalités de sexes semble en effet concerner en priorité les femmes les mieux dotées en capital scolaire, économique et social. Négociation par ailleurs facilité par un fort usage d’équipements collectifs de garde d’enfants et par les mesures mises en place pour aider les mères actives qui ont ainsi des possibilités financières. À l’autre extrémités de l’échelle sociale, les femmes, peu qualifiées, essaient de se maintenir sur le marché du travail. Ces femmes cumulent travail épuisant physiquement, longs trajets et absence d’aide domestique. Et quand elles interrompent leur activité pour raisons familiales, elles ont les plus grandes difficultés à se réinsérer professionnellement. Les rapports sociaux de sexes ne sont pas autonomes mais toujours articulés à l’ensemble des autres rapports sociaux : de classes sociales mais aussi d’âge, d’ethnie, et.

 

 

La sociologie des réseaux sociaux (3ème édition)
Pierre Mercklé

par Séléna G.

 

  Traditionnellement, la sociologie met surtout en valeur l’appartenance à des groupes sociaux, l’analyse en termes de réseaux permet de dévoiler d’autres principes de fonctionnement.

 

  La sociologie des réseaux sociaux est caractérisée par « un ensemble de méthodes, de concepts, de théories, de modèles et d’enquêtes, mis en œuvre en sociologie comme dans d’autres disciplines des sciences sociales (anthropologie, psychologie sociale, économie ...) qui consistent à prendre pour objets d’étude non pas les attributs des individus (âge, profession ...) mais les relations entre les individus (ou les groupes) et les régularités qu’elles présentent pour les décrire, rendre compte de leurs formations et de leurs transformations .

 

    Son but est de « restituer aux comportements individuels la complexité des systèmes de relations sociales dans lesquels ils prennent sens et auxquels ils donnent sens ».

 

 

Définitions générales :

 

  Les réseaux sociaux personnels reposent sur différentes formes de sociabilité.
La sociabilité est l’ensemble des relations qu’un individu entretient concrètement avec les autres et des formes que prennent ces relations.
La sociabilité est donc un ensemble de contacts (amicaux, professionnels, marchands, familiaux...p) qui ont lieu à l’occasion d’activités qui servent de supports aux relations avec les autres (interactions).

L’ensemble de ces réseaux sociaux peut constituer des réalités diverses : réseaux d’affinités amicales ou identitaires, réseaux utilitaires, réseaux mondains sociaux et culturels, réseau de pouvoir parallèles, d’influence, réseaux de contestation.

 

Il existe différents types de sociabilités : scolaire, professionnelle, familiale, amicale, politique, bourgeoise (rallyes mondains...)

 

Les individus sont également reliés par des liens faibles et liens forts : la force d’un lien interpersonnel est la combinaison du temps passé ensemble entre les acteurs, de l’intensité émotionnelle partagée, de la confiance mutuelle développée et des services échangées qui caractérisent ce lien.

 

Les trous structuraux font référence à l’absence de relations entre 2 personnes reliées à une même troisième.

 

Les liens faibles (connaissances) procurent aux individus des informations qui ne sont pas disponibles dans leur cercle restreint : « les individus avec qui on est faiblement lié ont plus de chances d’évoluer dans des cercles différents et ont donc accès à des informations différentes et celles que l’on reçoit » (« la force des liens faibles »).

 

Plus un acteur dispose de trous structuraux autour de lui (c’est à dire moins ses relations sont redondantes, moins elles se connaissent entre elles) et plus il peut espérer tirer de son réseau des bénéfices importants : le capital social ne dépend pas seulement du nombre des contacts mais aussi et surtout de leur non redondance.

 

I-             Origine du « réseau social »

 

    Si on se place d’un point de vue historique, les grands développements et les étapes de l’analyse en termes de réseaux sociaux ont eu lieu depuis la 2é moitié du XXème siècle.

 

    Elle a néanmoins eu des antécédents : Simmel (sociologie relationnelle) et surtout Jacob Moreno, inventeur de la sociométrie au début des années 30. Moreno : « le test sociométrique est un instrument qui étudie les structures sociales à la lumière des attractions et des répulsions qui se sont manifestées au sein d’un groupe ». Moreno invente également un instrument permettant d’en représenter facilement les résultats : le sociogramme.

 

    Le courant né avec notamment les travaux de Barnes et de White est désigné sous le terme d’analyse structurale des réseaux. Les sociologues procèdent donc à une incessante mise en relation entre les réseaux.

 

    Le terme « social network » fait son apparition dans un article de l’anthropologue britannique Barnes, en 1954.  Associant des apports issus de l’anthropologie, de la psychologie sociale et de la sociologie interactionniste, l’analyse des réseaux sociaux consiste à étudier des relations entre acteurs et les réseaux constitués par l’agrégation de ces relations.

 

II-                L’analyse des réseaux

 

   Mercklé précise : « deux développements sont fondamentaux pour la méthodologie de l’analyse des réseaux : ceux de la théorie des graphes et ceux de l’application de l’algèbre linéaire aux données relationnelles ».

 

  La théorie des graphes est familière aux mathématiciens qui l’ont progressivement appliquée à d’autres disciplines. « Son apport méthodologique est double : d’une part les graphes donnent une représentation graphique des réseaux de relations qui facilite leur visualisation et permet la mise en lumière d’un certain nombre de leurs propriétés structurales ; d’autre part, elle développe un riche corpus de concepts formels qui permettent de mesurer un certain nombre de relations entre les éléments ».

 

 
Un graphe se caractérise notamment par sa densité et sa connexité. Il permet en outre de mettre en évidence des relations matricielles. Selon Pierre Mercklé « les expressions comme réseau de relations, densité, clique, popularité, isolement, prestige etc. peuvent recevoir une définition mathématique opératoire, qui permet d’en construire des indicateurs, de les mesurer empiriquement et donc de tester des hypothèses ou de vérifier certaines propositions jusqu’alors peu vérifiables ».

 

Un indicateur retenu est celui de réseau personnel vs réseau complet.

 

   On remarque que l’idée de réseau complet pose aux sociologues un certain nombre de problèmes. Pour les analyser on décompose les réseaux en sous-ensembles : décomposition qui peut avoir des effets réducteurs. 
Parmi les propriétés mises en évidence, on retient en premier lieu la cohésion des groupes et la densité des liens, c’est un premier principe fondamental. Mais on peut aussi rapprocher les individus parce qu’ils ont les mêmes relations avec les autres sans être nécessairement liés entre eux. On parle alors d’équivalence, ce qui constitue un deuxième principe fondamental.

 

 Dans l’analyse structurale on considère que les catégories amalgament des éléments qui ne devraient pas l’être qui conduit à une conclusion fausse : les normes sont les causes des comportements.
Dans l’analyse structurale les normes sont construites et non figées, elles découlent des relations entre les individus selon leur position dans la structure sociale. On tient compte des relations concrètes entre les acteurs.

 

Pour Simmel, la sociologie démarre avec trois acteurs minimums, il parle de triade.

 

La structure est appréhendée comme un réseau de relations, elle est une contrainte qui pèse sur les choix, les comportements...

 

La forme du réseau a un effet sur les phénomènes, en même temps, elle est le résultat des interactions.

 

 

III-              La place « du Réseau des réseaux » dans l’étude des réseaux sociaux

 

   A la veille de l’explosion des nouvelles technologies de communication, au début des années 2000, l’idée d’un déclin du lien social était de fait très largement répandue… Et pourtant, dix ans plus tard, avec l’irruption d’Internet, la donne semble avoir radicalement changé : on ne parle plus de « déclin de la sociabilité », mais au contraire de l’avènement d’une « nouvelle sociabilité », profondément transformée et renouvelée…

 

    Internet s’est imposé de façon massive comme une technologie multiforme de communication interpersonnelle. Le succès massif est arrivé avec MySpace, créé en 2003, et qui comptait 300 millions de membres au début de l’année 2010, et surtout avec Facebook, apparu l’année suivante, et qui a désormais dépassé son aîné, avec 500 millions de membres en juillet 2010, dont 17 millions de Français.

 

 

   Les effets réels de ces nouveaux outils de communication sur le lien social sont nombreux, Mercklé y observe deux visions opposées : d’un côté, une vision « technophile » enchantée, faisant d’Internet le moteur de l’avènement d’une société globale plus ouverte, démocratique, fraternelle, égalitaire, et de l’autre une vision « technophobe », faisant au contraire d’Internet un ferment de destruction ou de nivellement des valeurs et de destruction du lien social.

 

   Pour conclure, selon Pierre Mercklé, Internet n’a as réellement provoqué une révolution dans les réseaux : il oblige à une nouvelle réflexion sur ce qu’est une relation, sur ce qu’est le lien social, et il impose une conception élargie de la sociabilité, dans laquelle les relations à distance verraient leur importance et leurs effets réévalués ; pour autant, l’engouement des usagers pour les réseaux sociaux en ligne « ne doit masquer ni l’ancienneté de pratiques et de formes de sociabilité dont il serait très naïf de croire qu’elles ont été engendrées par Internet, ni par conséquent l’ancienneté des traditions et des travaux sociologiques qui s’attachent depuis au moins un demi-siècle à les prendre pour objets centraux de leurs investigations ».

 

    Ainsi, il faut plutôt considérer qu’Internet, accompagne un certain nombre de ces transformations des relations sociales (affaiblissement des liens, transformation de la notion de groupe, horizontalisation et informalisation des relations…). En réalité, ces transformations ont précédé Internet, dès les années 60, et l’ont peut-être même suscité, plutôt qu’elles n’en sont les conséquences : l’autonomie et le fonctionnement en réseau ne sont pas des inventions d’Internet, ce serait plutôt Internet qui serait le produit de l’autonomie et du fonctionnement en réseau.